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31 juil. 2015
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Des bazars bon marché aux vitrines branchées, l'espadrille devient un produit de luxe

Par
AFP
Publié le
31 juil. 2015

L'espadrille est la star de l'été et habille les pieds les plus branchés : en quelques saisons, la modeste chaussure à semelle de corde est allègrement passée des bazars bon marché aux vitrines de luxe, où les modèles se vendent à prix d'or.

Une espadrille Louboutin


Ne pas proposer d'espadrilles cette saison serait presque un « fashion faux-pas » pour les maisons de luxe : quasiment toutes en alignent au beau milieu de leurs stilettos, même Christian Louboutin qui laque de son célèbre vernis rouge le dessous de ses semelles de jute.

Les prix font tourner les têtes : 395 euros l'espadrille cloutée de Saint Laurent, 420 euros le modèle Céline en poulain turquoise ou celui en denim de Louis Vuitton, 255 euros la paire en brocart de Dolce & Gabbana, 590 euros la version brodée de Dior, ou encore 690 euros celle de Prada, en python, ornée d'un petit noeud.

L'homme n'est pas en reste, avec par exemple un modèle Ralph Lauren en crocodile - « fabriqué en Espagne et cousu main » - qui culmine à 2.100 dollars.

« Le prix n'est pas un problème car les consommateurs investissent dans un style, un statut, une affirmation de qui ils sont. Ils portent donc une marque qui montre qu'ils ont de l'argent », analyse Kevin Guildford, professeur en design de la chaussure à l'université De Montfort de Leicester (Royaume-Uni).

Se pose la question des marges réalisées par les groupes de luxe : « L'espadrille est très à la mode et il faut répondre à la demande. Bien sûr, certaines espadrilles sont produites en Espagne, en France et dans le sud de l'Italie, mais seule l'Asie peut fournir de gros volumes à des prix bas », selon lui.

Le Bangladesh est le principal exportateur de jute, herbe dont les fibres servent à tresser les semelles. Avec la Chine, il est aussi le pays qui produit en masse des espadrilles bon marché pour l'Europe.

Sur les sites des grandes marques, le pays de fabrication des espadrilles est rarement mentionné : Gucci annonce des « matières Made in Italy » et des « chaussures réalisées en Espagne », Fendi appose un « Made in Italy » tout comme Valentino, et Saint Laurent précise « pays de fabrication : Espagne ».

Espadrille du fabricant du pays basque Espasoule


« Mais, même si une espadrille est cousue main, cela ne justifie absolument pas les prix pratiqués par les grandes marques, ça me fait râler ! », résume à l'AFP Monique Marzat de l'entreprise Espasoule, l'un des six derniers fabricants encore en activité à Mauléon au Pays basque, capitale de l'espadrille.

« L'espadrille Made in France est très recherchée, nous exportons 40 % de notre production », explique l'ex-gérante qui travaille encore aux côtés de son fils, maintenant à la tête de la société. Espasoule emploie 20 salariés qui produisent à la machine jusqu'à 2.400 paires par jour.

Chez Prodiso, toujours à Mauléon, la production journalière ne dépasse pas 120 paires car tout est cousu main. « Au début, tous les sandaliers faisaient des modèles basiques vendus dans les bazars, puis la grande distribution s'est mise à l'espadrille en se fournissant en Asie car elle en voulait beaucoup, pour pas cher. C'est la montée en gamme qui nous a sauvés grâce à des collaborations avec des créateurs », explique le fondateur, Jean-Pierre Errecart.

L'entreprise a par exemple produit les collections Cyrillus et DDP de cet été, et prépare des modèles pour un célèbre chausseur français.

« Aujourd'hui, sur 100 paires d'espadrilles vendues en France, entre 70 et 80 sont importées. Mais les autres proviennent essentiellement de Mauléon », indique Jean-Pierre Errecart.

La Fédération française de la chaussure estime que quatre millions de paires seront vendues en France en 2015, en croissance de 5 % sur un an. La production française est estimée à un peu plus d'un million.

Au début du siècle dernier, l'industrie sandalière de Mauléon a employé jusqu'à 1.500 personnes, rappelle Jean-Pierre Errecart : « N'oublions pas que l'espadrille était initialement une chaussure de travail, portée par les mineurs et les ouvriers. Et dans les années 1950, on avait une paire blanche pour le dimanche, et une noire pour travailler. »

Par Katia Dolmadjian

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