AFP
14 nov. 2011
Quand la mode française rend hommage à l'artisanat roumain
AFP
14 nov. 2011
BUCAREST, 11 nov 2011 (AFP) - Une robe brodée de "perles soleil cuivré", des talons comme la Colonne sans fin du sculpteur Brancusi: un créateur français venu du monde de la haute couture a présenté à Bucarest une collection chatoyante hommage à la Roumanie, fruit d'un travail inédit avec des artisans roumains.
collection de Philippe Guilet à Bucarest le 10 novembre 2011 pour le projet 100%.RO - Daniel Mihailescu/AFP |
Baptisée "Préjugés", la collection de mode féminine montrée jeudi, a été imaginée par Philippe Guilet, ancien collaborateur de Jean-Paul Gaultier, Karl Lagerfeld et Thierry Mugler. Elle doit être lancée à Paris au début de l'année prochaine.
Elle veut combattre les stéréotypes négatifs qui collent à la peau de ce pays où se croisent influences latine, française, balkanique, hongroise, slave et rom et qui a su garder un artisanat ancestral d'une rare richesse en Europe.
"La Roumanie fait l'objet de beaucoup de sarcasmes or ce pays est tout le contraire de ce qu'on peut en dire", souligne M. Guilet qui vient d'y passer quatre ans.
Cet ancien directeur de recherches de Jean-Paul Gaultier, a lancé 100%.RO, projet destiné à réinterpréter le patrimoine roumain dans un nouveau langage culturel.
Loin du cliché de grisaille omniprésente, il a découvert les perles de verre traditionnelles et multicolores brodées par des artisans comme Virginia Linul de Bistrita Nasaud (nord-ouest) sur des vêtements, colliers ou ceintures. Une tradition transmise de génération en génération.
"Les perles que nous utilisons pour nos broderies traditionnelles ont autant de couleurs qu'un champ de fleurs au printemps", dit à l'AFP Ana Bodescu, une des femmes du village de Mme Linul qui a travaillé à la collection.
En lieu et place de costumes traditionnels, Mme Linul et les femmes du village de Salva ont brodé une veste toréador, des colliers de dentelles perlées pour une robe longue en organdi noir ou encore un tailleur entier effet tweed.
Certaines créations ont nécessité des mois de travail et plusieurs kilos de perles.
De ces rencontres dans l'intimité des maisons de zones rurales où l'on trouve encore de nombreux métiers à tisser manuels, des outils pour travailler le bois datant du XVIe siècle ou des artisans utilisant des aiguilles en os pour broder sur les peaux de mouton retournées, Philippe Guilet a tiré 34 tenues baptisées chacune du nom de femmes roumaines: Anca, Alina, Ioana.
Nombre de créations sont passées par les "mains d'or" de Constantin Juravle, un sexagénaire du village de Straja, en Bucovine (nord) dont la famille travaille depuis des générations les peaux de mouton retournées, avec une technique de coupe gardée secrète.
Des orfèvres roms d'une famille façonnant les métaux précieux depuis 300 ans ont créé des dentelles de métal pour une robe. Au total une cinquantaine d'artisans ont participé à la collection.
Ce projet "est une conjugaison entre la modernité et le travail ancestral", dit M. Guilet en soulignant qu'existent encore en Roumanie des savoir-faire aujourd'hui disparus en France.
Une "conjugaison" illustrée avec émotion, lorsque ces artisans qui pour certains sortent rarement de leur village ont défilé à la fin, en costume traditionnel, dans les élégants salons de la Résidence de France transformée en "catwalk", aux côtés des mannequins, de M. Guilet et des designers les plus connus de Bucarest.
Virginia Linul résume: "Philippe est venu de l'extérieur et a apprécié la valeur du travail manuel. Le fait qu'il nous ait mis en valeur est extraordinaire. Personne n'avait fait cela pour nous. Les gens peuvent découvrir le vrai visage de la Roumanie, une facette que l'on ne voit pas en général et qui est plus belle".Par Isabelle WESSELINGH
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