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Traduit par
Marguerite Capelle
Publié le
4 juil. 2018
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Vision orphique et poétique de la couture chez Fendi

Traduit par
Marguerite Capelle
Publié le
4 juil. 2018

Au moment où l'on se voyait déjà finir noyé dans une marée de blogueurs lèche-bottes, de technique ultra-complaisante et d’hommages conventionnels à l’ADN des maisons de mode, voilà que débarquent Karl Lagerfeld et Silvia Fendi pour enfin nous faire rêver.
 

Fendi - automne-hiver 2018 - Haute Couture - Paris - © PixelFormula


Plus précisément, ils s’y emploient chez Fendi en repoussant de nouvelles limites et en réinventant la roue, avec pour objectif la création d’un nouveau paradigme pour la griffe de fourrure la plus célèbre au monde. Le tout en injectant un peu de poésie dont avait bien besoin le monde de la couture.

« Vous aurez peut-être du mal à croire, mais 80 % de ces vêtements ne sont même pas en fourrure », claironnait Karl Lagerfeld dans les coulisses du Palais Brongniart, l’ancienne place de la Bourse française.

Inspirée par le mouvement artistique du cubisme orphique et son obsession pour les motifs géométriques et l’abstraction lumineuse, la collection avait de fantastiques accents artistiques – perceptibles notamment dans les remarquables motifs circulaires qui couvraient de nombreux manteaux épatants.

« En fait, cette pièce est en mouton retourné », corrigeait poliment Silvia Fendi, en réponse à la question d’un rédacteur qui désignait en coulisses un manteau couleur miel à se damner, avec ces fameux cercles multiples imaginés par le peintre tchèque František Kupka, qui était forcément du vison… mais non, c’était vraiment du mouton retourné.

Un manteau multicolore remarquable évoquait les tableaux de Robert Delaunay représentant une architecture abstraite, verticale. Il semblait évident qu’il était en mouton retourné, mais en fait c’était de l’organza. Un manteau vraiment somptueux, en astrakan noir et aux larges épaules, transpirant la classe, s’est révélé être en velours. Tandis qu’un boléro abstrait stupéfiant avec une jupe portefeuille à franges, semblant tout droit sortie d’un tableau de Sonia Delaunay, ressemblait à s’y méprendre à du cuir… alors qu’il était en organza.

La collection était nommée assez judicieusement Fendi Couture, par opposition à son ancien intitulé plus restrictif, Fendi Fourrure. Le tout était porté par des mannequins chaussés de souliers à la croisée du multimédia à la Memphis et du cubisme, avec des talons en plexiglas, érable et corne.

Bien au-delà de la technique, c’était une vision d’un raffinement parfait, avec des couleurs exceptionnelles et une noblesse pleine d’énergie. Un vrai soulagement après une saison tiraillée entre audace technique et propositions rebattues et convenues.


Fendi Couture Automne-Hiver 2018 - Photo: PixelFormula

 
Le concept d’orphisme lui-même a été inventé par le grand poète français Guillaume Apollinaire, que les qualités littéraires du programme papier auraient sans doute laissé de glace avec ses concepts du genre « cascades d’agneau de Mongolie ». Mais encore...

Ceci étant dit, le défilé marquait également des débuts parisiens flamboyants pour le nouveau PDG de Fendi, Serge Brunschwig, qui irradiait littéralement la satisfaction. Même si ses deux prédécesseurs, Michael Burke et Pietro Beccari, étaient aussi tous les deux en coulisses pour savourer leur petite part de gloire.

« Absolument sublime », a opiné le président de LVMH et véritable propriétaire de Fendi, Bernard Arnault, en serrant Karl Lagerfeld dans ses bras.

Interrogé sur une tribune récemment publiée dans le New York Times qui affirmait que LVMH et ses concurrents Kering et Richemont étaient tous en train de se séparer des marques les plus modestes de leur portefeuille pour préparer de nouvelles acquisitions majeures, Bernard Arnault s’est contenté de hausser les épaules. « Oh, nous n’avons pas vendu grand-chose... Ecoutez, les grandes marques, c’est comme les grands tableaux, la meilleure chose à faire, c’est de ne pas les lâcher ! »

« Un peu comme vos créateurs ? » suggérait alors un rédacteur. « Exactement, comme les grands créateurs », a souri Bernard Arnault.

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