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A Paris, la mairie hausse le ton contre l'affichage illégal

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AFP
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1 févr. 2022

Paris, 1 fév 2022 (AFP) - Spectacles, mode mais aussi monde politique dans le viseur: à Paris, la mairie a déclaré la guerre à l'affichage illégal, sans toutefois dissuader encore les agences marketing qui vont jusqu'à revendiquer ces pratiques, ni certaines associations clientes... qu'elle soutient financièrement.


Un panneau d'affichage détourné pour protester contre le projet de loi sécurité globale, le 15 mars 2021 à Paris - AFP


"Des affiches publicitaires, il y en a de plus en plus." Dans un coin de la place de la Bastille, Alan, 47 ans, vient de passer un quart d'heure avec son binôme Joachim, 37 ans, pour décoller environ 20 m2 d'affiches placardées sur une façade obstruée.

Alan s'emploie à arracher d'un mouvement d'épaule un maximum d'affiches jointes par la colle et l'humidité, avant que Joachim ne finisse le travail avec le nettoyeur haute pression et un coup de raclette pour évacuer les boulettes de papier détrempées par l'eau à 90 degrés.

"Quand le temps est sec, la colle est plus dure à enlever, on met plus de temps." Ces deux agents de nettoyage de la Ville sont engagés dans un combat sans fin contre les agences publicitaires qui passent outre l'interdiction d'utiliser les murs de la capitale, privés ou publics.

"Si ça se trouve, ils sont en train de nous observer et dès qu'on va partir, ce sera recouvert", prédit Alan qui a subi ce désagrément la veille, ailleurs dans la capitale. "On avait passé 45 minutes dessus. Je suis repassé le lendemain, il y avait d'autres affiches. C'est comme si on n'avait rien fait."

- Montants quadruplés -



Devant ce phénomène qui "dégrade l'espace public" et revient "à privatiser ce qui appartient à tous", alors "que les supports commerciaux existent", Colombe Brossel, l'adjointe à la propreté de la maire PS Anne Hidalgo, sonne la révolte.

D'abord avec "plus d'agents, plus de moyens et une meilleure organisation", souligne-t-elle à l'AFP. La Ville mobilise désormais sur ce terrain 30 à 40 agents qui enlèvent environ 1.600 m2 d'affiches chaque semaine, "soit 3 terrains de tennis", a-t-elle indiqué au Conseil de Paris de décembre.

De quoi répondre aux 500 affichages sauvages signalés chaque semaine par les Parisiens via DansMaRue, l'application de signalement des incivilités sur laquelle se basent les agents de nettoyage pour leur tournée.

Résultat, le total des constats pour recouvrement, calculés en fonction de la surface identifiée, est passé de 250.000 euros en 2019 à 960.000 en 2021, quand 1.600 factures ont été envoyées. Mais avec un forfait débutant à 500 euros, "ce montant n'est pas dissuasif pour un certain nombre de groupes côtés au CAC 40", souligne l'élue socialiste, qui pointe du doigt les "agences de comm', les grands groupes de produits culturels et les grands groupes de mode".

Plus dissuasives, les amendes administratives, comme celle de 15.000 euros infligée fin 2020 par la préfecture d'Ile-de-France à Urban Act, agence de publicité qui se revendique "experte en affichage sauvage", sont encore du ressort de l'Etat et restent très rares.

D'où la demande de la Ville de récupérer en 2024 cette compétence, une possibilité offerte par un amendement de la loi Climat et Résilience votée en août 2021. "Un outil supplémentaire" pour frapper au portemonnaie, espère Colombe Brossel, qui n'hésite pas non plus à employer la technique du "name and shame" (dénoncer pour blâmer) sur Twitter.

Les artistes Gad Elmaleh ou Eddy de Pretto ont ainsi été brocardés, mais aussi le festival de musique We Love Green ou l'association Adie, deux organismes... soutenus financièrement par la Ville. De quoi susciter la colère de l'association des usagers de DansMaRue (Audmr).

- Macronistes en flagrant délit -



Certains clients promettent qu'on ne les y reprendra plus, selon Colombe Brossel, qui ne "remet pas en cause" cette excuse et se réjouit que les mentalités évoluent.

L'association Résistance à l'agression publicitaire (RAP), elle, veut aller plus loin avec la dissolution de ces agences spécialisées dans la "guérilla marketing". Mais l'affichage sauvage ne se résume pas au commercial: dans le XIe arrondissement, Alan et Joachim tombent ainsi sur un lot d'affiches... "Avec vous", pré-campagne des macronistes qui ne dit pas son nom. L'Audmr dénonce aussi l'affichage sauvage des militants de Jean-Luc Mélenchon ou d'Eric Zemmour.

En décembre, le Conseil de Paris a formé le voeu "qu'aucun affichage sauvage politique ne soit réalisé et à favoriser l'affichage libre pour les partis et associations". Pour la députée et conseillère MoDem de Paris Maud Gatel, il faudrait pour cela "que la mairie de Paris respecte la loi, car elle n'a pas le nombre de panneaux" prévus.


Par Pierrick YVON

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