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Paul Kaplan
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11 déc. 2019
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Anine Bing, ou comment une influenceuse a su bâtir une marque internationale

Traduit par
Paul Kaplan
Publié le
11 déc. 2019

Il y a quelques années, à l'époque où les "blogueurs" sont progressivement devenus des "influenceurs", Anine Bing donnait naissance à sa propre maison de mode. Cette jeune Danoise dynamique et pétillante a lancé son label en 2012 à Hollywood, en commençant par dix silhouettes, et en pariant sur sa notoriété sur les réseaux sociaux. Aujourd'hui, Anine Bing distribue ses collections dans plus de 300 points de vente à travers le monde et peut s'enorgueillir de quinze magasins en propre : un exemple à suivre si l'on est une influenceuse et qu'on rêve de créer sa marque.


Anine Bing - Instagram


Cette jeune maman à l'esprit tranquille a réussi à poser les bases d'un empire de la mode grâce à son goût assuré, son travail acharné et son intuition sur ce que les femmes d'aujourd'hui veulent vraiment porter. Fashionnetwork.com a rencontré Anine Bing, fraîchement débarquée de Los Angeles où elle habite, lors d'un déjeuner dans le Marais, près de son magasin parisien de la rue des Coutures Saint-Gervais, à l'occasion de son dernier lancement : une ligne de sweat-shirts et de tops imprimés d'un célèbre portrait de Brigitte Bardot une cigarette à la main, photographiée par Terry O'Neill, décédé le mois dernier.

"J'ai connu une enfance assez simple, nous n'avions pas beaucoup d'argent. Mais j'adorais la mode et je savais que j'allais mener une carrière créative. J'ai commencé par retravailler des pièces vintage. J'ai déménagé à Los Angeles car c'est une ville qui déborde de créativité. Les rêves n'y sont jamais trop ambitieux", explique Anine Bing, qui a grandi auprès de ses quatre frères et sœurs, de sa mère institutrice et de son père homéopathe.

La jeune femme a commencé son blog "Anine's World" pour raconter ses voyages et son expérience de mannequin à ses amis, avant que son audience ne prenne de l'ampleur. "Les gens se sont rapidement intéressés à mon style. J'ai toujours été douée pour mélanger des pièces vintage avec de nouvelles marques. Aujourd'hui, je ne suis plus seulement une influenceuse. Ces sept dernières années, nous n'avons pas ménagé nos efforts pour construire la marque à l'international", s'exclame-t-elle, encore étonnée de la rapidité de sa croissance.

"On a commencé en secret dans notre garage. Et puis un jour, j'ai montré le fruit de notre travail à mes abonnés. Les premières pièces que nous avons vendues étaient un t-shirt en lin et un jean", raconte la créatrice, qui prononce son prénom "Anina". Quant à son nom de famille, Bing, elle l'a emprunté à sa grand-mère.

Sa première collection faisait le choix de la simplicité : du denim, des tee-shirts et des vestes en cuir. Son mari Nico Bing, qui a lui aussi adopté le nom de l'aïeule, s'occupe de la production, tandis qu'Anine est responsable du marketing et de la création. La gamme de sa marque s'étend du pyjama en soie pour soirée élégante aux sous-vêtements en dentelle. Son ADN prône un certain mode de vie réaliste, empreint d'un esprit californien et d'une légère touche d'audace.


La robe "Harley Tee" de la collection d'Anine Bing en collaboration avec Terry O'Neill. - DR


Au lancement de sa marque, elle avait 50 000 abonnés sur Facebook et à peine 4 000 sur Instagram, qui venait de démarrer. "Aujourd'hui, j'ai plus de 760 000 abonnés sur Instagram. Je n'utilise plus Facebook personnellement, seule ma marque a une page sur la plateforme", indique Anine Bing, qui a fait partie plus jeune d'un groupe de rock appelé Kill Your Darlings ("Tuez vos chéris" en VF). "Je sais, c'est plutôt sinistre", glousse-t-elle.

Sur Instagram, sa marque (@aninebingofficial, qui compte 198 000 abonnés) publie des images de campagne, de temps en temps un portrait d'Anine Bing elle-même, mais surtout des mannequins et des images des produits. Sur son propre compte (@aninebing, 769 000 abonnés), le contenu est beaucoup plus personnel : elle y présente ses voyages, de Berlin à Miami, son studio de création ; elle y dévoile ses impressions personnelles ou ses vacances en famille au Mexique, et des portraits de ses deux enfants.
 
En 2014, Anine Bing ouvre son premier magasin à Los Angeles, qui fonctionne alors selon une approche "see now, buy now". La boutique est située sur West Hollywood, à côté de La Cienega : "Un bon emplacement. L'espace était minuscule mais tout s'est très bien passé", se souvient Anine Bing, qui a ensuite ouvert des points de vente à New York puis à Paris, et qui vend désormais partout, de Net-A-Porter à Nordstrom.

50 millions de dollars de ventes en 2019



À l'image de ses choix de carrière atypiques, la stratégie marketing d'Anine Bing est elle aussi innovante. Ses campagnes publicitaires sont conçues exclusivement pour les médias sociaux. Anine Bing n'achète pas d'espaces publicitaires dans des magazines papier, mais dépense son budget en publicités Google, et investit lourdement pour cibler sa clientèle. "C'est là que va mon budget, même si j'aime beaucoup les magazines. La vérité, c'est qu'ils sont très chers. On a eu un rendez-vous avec Vogue, pour discuter de notre image de marque. Mais..." et, laissant la fin de sa phrase en suspens, elle hausse les épaules.

Cette année, le chiffre d'affaires de sa société va atteindre "près de 50 millions de dollars" (45 millions d'euros), révèle Anine Bing, qui compte aujourd'hui 80 employés à son siège social de Los Angeles. Son ambition est de doubler ses ventes en 2020, en ouvrant plus de magasins, en améliorant son offre de produits et en investissant dans le recrutement de talents créatifs.


Une tenue de la collection Anine Bing. - DR

 
En septembre 2018, un trio de trois investisseurs — Index Ventures, Felix Capital et Greycroft Partners — a injecté 15 millions de dollars au capital d'Anine Bing, pour alimenter sa croissance. "Ils ont investi beaucoup d'argent, mais j'ai toujours le contrôle", insiste la jeune femme.

"Mon ADN mélange mon héritage rock'n'roll scandinave et mon mode de vie à Los Angeles. Les pièces sont décontractées et faciles à porter, du matin jusqu'au soir : chics mais jamais trop. D'abord influenceuse, je suis devenue une marque. Et en quelque sorte, la marque me dépasse. Honnêtement, c'est un grand moment de fierté pour moi quand les gens connaissent la marque avant de me connaître."

Anine Bing a également l'intention de présenter un parfum au printemps 2020, après avoir dévoilé une huile parfumée. Elle va inaugurer cinq magasins l'année prochaine. Dans cinq ans, elle vise 50 adresses. Signe de sa réussite, sa ligne de tee-shirts "rétro-glam" de Brigitte Bardot shootée par Terry O'Neill, lancée le mois dernier, s'est vendue comme des petits pains. "C'est si triste pour Terry. Il est mort trois jours avant notre lancement. Il était malade quand je l'ai rencontré, mais il n'a rien dit. Je ne savais rien de sa situation, il avait l'air en pleine forme", raconte-t-elle. 

Anine Bing, qui n'a pas suivi de formation mode, admire ses condisciples autodidactes. "J'admire Coco Chanel. Je sais que ça a l'air ringard de dire ça, mais c'est vrai. Et aussi d'autres créatrices plus jeunes, comme Isabel Marant au Cécilia Bönstrom de Zadig & Voltaire, qui est suédoise. Mais j'essaie de tracer mon propre chemin. Je m'inspire des marchés aux puces, de la musique et des voyages. Je dirige aujourd'hui une équipe de développement très talentueuse. Mais au début, tout était dans ma tête et je devais tout expliquer à mon usine en Turquie. J'adore donner du pouvoir aux femmes pour qu'elles se sentent bien dans leur peau."

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