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Traduit par
Clémentine Martin
Publié le
30 juin 2022
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Arturo Obegero, Oteyza, Alled-Martínez et Mans: l’homme espagnol défile à Paris

Traduit par
Clémentine Martin
Publié le
30 juin 2022

À Paris, il n’est pas rare d’entendre des conversations teintées d’un accent espagnol au coin d’une rue ou en terrasse. Et les collections de mode masculine du pays voisin revendiquent leur place dans l’agenda pourtant déjà très chargé de la capitale française. La dernière Fashion Week homme s’est terminée dimanche 26 juin dernier avec le défilé Celine, et les designers espagnols ont montré qu’ils avaient bien leur place dans la cour des grands. Révision des codes de genre, réinterprétations du costume classique, la mode espagnole fourmille d’idées.


Collection “Song to the siren“ - Arturo Obegero


Arturo Obegero déclare son amour à sa région



Le talent et la persévérance sont deux traits de caractères très représentatifs du jeune talent Arturo Obegero, originaire des Asturies mais installé à Paris. Diplômé en 2018 de la prestigieuse école Central Saint Martins de Londres, sa carrière fulgurante l’a amené à rejoindre les rangs de Lanvin puis à présenter le premier défilé de la marque qui porte son nom en mars 2020, juste avant le début de la pandémie. Mais c’est en avril 2022 qu’il a véritablement commencé à être sur toutes les lèvres, quand le chanteur Harry Styles est apparu vêtu de l’une de ses combinaisons rouges à sequins dans le clip de son single “As it was“.

Ses créations théâtrales et suggestives ont une fois de plus défilé à Paris, avec une présentation interactive à la galerie Neoramart qui a eu lieu jeudi 23 juin dernier. Véritable déclaration d’amour à Tapia de Casariego, son village d’origine, le défilé d’Arturo Obegero rend hommage aux paysages de sa terre d’origine, aujourd’hui menacés par un projet d’exploitation de mine d’or. Intitulée “Song to the Siren“ (Chanson à la Sirène, NDLR) en référence à un titre du groupe anglais This Mortal Coil, cette collection mixte se teinte de coloris naturels allant du lilas au jaune en passant par diverses nuances de bleues. Une palette éloignée de l’intensité chromatique qui caractérise habituellement le créateur.

Ces couleurs plus douces vont de pair avec des silhouettes plus décontractées et éthérées. Arturo Obegero signe une garde-robe romantique inspirée de l’œuvre des surréalistes Man Ray et René Magritte, avec de longues chemises en soie blanche et des pantalons taille haute, déjà emblématiques de la marque. Des tops asymétriques drapés et une jupe bleu électrique au tombé un rien provocateur rappellent le mouvement des vagues et l’imagerie des sirènes. Sans oublier les vestes de costume à double boutonnage ou l’ensemble blanc bordé de plumes aux épaules, au bas des manches et aux chevilles. L’un des looks les plus originaux de la collection, inspiré d’un être mythique de sa région appelé “l’Espumero“, une créature censée habiter les cavernes en bord de mer.

Harry Lambert, le styliste qui imagine les looks toujours très médiatisés de l’ancien chanteur de One Direction, a assisté à la présentation. Deux combinaisons dans le plus pur style de Harry Styles auront peut-être retenu son attention : un modèle à bretelles d’une intense couleur écarlate et un modèle noir à col montant, brodé de détails brillants rappelant un ciel étoilé.


Collection “Aire“ - Oteyza


Oteyza: quand un tailleur classique se met à la “street couture“



Oteyza revient enfin au format physique après quatre saisons de défilés digitaux. À la fashion week de Paris, la marque s’est distinguée avec une présentation interactive à l’ambassade d’Espagne, où le designer de la marque lui-même se chargeait de guider et de placer les mannequins. À l’occasion de sa sixième participation à l’événement, il a dévoilé sa collection “Aire“ pour le printemps/été 2023. Dans un film tourné aux jardins du Trocadéro, au pied de la tour Eiffel, il a révélé des silhouettes en mouvement inspirées de l’œuvre colorée de Raoul Dufy, dans des nuances de bleu vif, gris perle, rose fuchsia, beige et noir intense, la couleur de prédilection de la maison.

Les 25 looks restent fidèles aux matières habituelles de la marque: la laine mérinos, le lin, le coton et la soie abondent dans des costumes aux lignes plus contemporaines. Les coupes architecturales et les drapés fluides caractérisent des vestes déstructurées, des capes galonnées, des pantalons à pinces ajustés et lacés, d’élégants bermudas, des jupons et des chapeaux de Cordoue. Les éléments se superposent pour créer de nouveaux volumes et jouent sur l’asymétrie. Un ample ensemble aux tonalités ocres, avec un béret noué autour du cou, habille la seule mannequin féminine.

“Nous avons souhaité proposer des vêtements fonctionnels mais très élégants, sans renoncer à notre esthétique propre au costume et à nos patronages élaborés. Les propositions plus sophistiquées ont leur place dans le streetwear et peuvent côtoyer des vêtements plus décontractés“, revendique Caterina Pañeda, cofondatrice de la marque. La nouvelle collection introduit d’ailleurs à nouveau des baskets minimalistes et comporte même pour la première fois des pièces plus accessibles, comme des polos et des t-shirts. “Nous avons commencé comme une marque de niche et petit à petit, nous nous rapprochons du streetwear plus mainstream“, ajoute Paul García de Oteyza, l’autre cofondateur. Pour lui, il est essentiel de conserver “une touche artisanale“ et un “bagage en confection“.

La marque a cédé une participation minoritaire dans son capital au groupe Perfumes y Diseño en 2021 et a un agenda prévisionnel bien rempli. Elle aimerait développer sa propre fragrance aux côtés de son partenaire, dirigé par Pedro Trólez, et va aussi entreprendre de conquérir l’étranger avec son nouveau showroom parisien, No Season. “Nous sommes une entreprise familiale et nous progressons à petits pas, nous voulons aborder notre croissance sans nous précipiter“, soulignent les deux créateurs, qui visent le juteux marché asiatique.

Et pour cela, cette marque basée à Madrid a encore un as dans sa manche : une comédie musicale conceptuelle et contemporaine, inspirée du défilé réalisé en 2018 aux côtés du Ballet National d’Espagne, qui reflètera l’importance de la brebis mérinos dans la culture et l’économie. “La mode a un côté très éphémère et nous voulons nous appuyer sur des valeurs culturelles“, affirme le duo. Le spectacle sera présenté dans plusieurs villes, mais il faudra attendre l’année prochaine pour y assister.


Collection "Reclaiming the fields" - Alled Martinez


Ambiance métrosexuelle chez Alled-Martinez



Archie, qui se cache derrière la griffe Alled-Martinez, fait partie des jeunes talents à suivre. Le designer barcelonais vient de présenter sa première collection capsule pour la marque Karl Lagerfeld et a rejoint “First Class“, le nouveau projet de télé-réalité de Netflix qui suit un groupe d’amis passionnés de luxe et de mode. Diplômé de Central Saint Martins, ce lauréat du prix LVMH pour les étudiants en mode en 2018 a présenté sa nouvelle collection “Reclaiming the Fields“ (Reprendre les terrains, NDLR) lors de la journée de clôture de la fashion week parisienne avec un défilé au Palais de Tokyo.

Le concept: “revendiquer le terme de métrosexuel“, qui cache encore souvent des connotations homophobes. Formé chez Givenchy, ce designer s’attaque aux silhouettes emblématiques des années 2000 selon une perspective actuelle avec des influences homo-érotiques, sur fond de vestiaires de foot. Du côté des vêtements, on trouve des chemises sans manches en vichy rose, des jeans patchwork et des pantalons à braguettes déboutonnées, des tops courts et ajustés, des t-shirts à manches longues jouant sur les superpositions, de grands pantalons cargo en polyester peau de pêche et des chemises à fermeture éclair en taffetas de nylon. La firme est friande de maille et le montre à nouveau avec des pantalons en jersey élastique à taille (très) basse pour l’occasion.

Les accessoires méritent une mention spéciale : des sacs XXL en jean, en toile noire ou en macramé de soie beige, et des ceintures réalisées artisanalement par Alicia Medina. Les shorts de bain sont aussi bien présents dans la collection, avec des coupes rétro déclinées en viscose ou en denim élastique.

Chez Mans, explosion de couleurs et d’imprimés



Le créateur a défilé mercredi 29 juin à Madrid. Mais avant cela, la dernière collection de la griffe masculine Mans, intitulée “Raíces“ (Racines), a été présentée en avant-première à Paris. L’événement a eu lieu au showroom Boon, à quelques pas seulement de la Bastille. Les participants ont pu y découvrir les nouvelles idées du créateur sévillan Jaime Álvarez, avec des imprimés originaux et des fusions de couleurs vives allant de l’orange au fuchsia en passant par le bleu électrique.

Proposant généralement des costumes classiques aux coupes amples et décontractées, cette marque fondée en 2017 fabrique ses pièces en Espagne et se spécialise dans la confection sur-mesure. Mais cette fois-ci, elle a osé expérimenté avec de nouvelles coupes et silhouettes, ce qui se traduit par des boléros structurés, des vestes à double boutonnage avec des rabats oversize, des chemises fluides à manches longues saturées de fleurs et des shorts inspirés de pantalons à pinces. Les sandales minimalistes été les sacs XXL en cuir imprimés de silhouettes de chevaux se chargent d’apporter de la nouveauté. Déjà considérée comme l’une des marques à suivre en Espagne, Mans compte bien se développer aussi à l’étranger et agrandir son réseau de distributeurs. L’acteur star du biopic sur Elvis, Austin Butler, fait déjà partie de ses clients.

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