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Reuters
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Clémentine Martin
Publié le
23 mai 2019
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Au Bangladesh, les syndicats du textile craignent une nouvelle dégradation des conditions de sécurité

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Reuters
Traduit par
Clémentine Martin
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23 mai 2019

L’accord international conclu pour assurer des conditions de travail décentes aux travailleurs textiles au Bangladesh prend fin et les syndicats craignent une dégradation de la sécurité. Ce sont les propriétaires d’ateliers qui seront désormais seuls responsables du respect des normes, regrettent les syndicats.


Un tribunal a approuvé dimanche le transfert des compétences de l’équipe de supervision des ateliers désignée dans le cadre de l’Accord à un groupe mené par l’association des principaux fabricants de vêtements du pays - Flickr


L’Accord sur les Incendies et la Sécurité des Bâtiments au Bangladesh a été imaginé par des marques européennes pour améliorer la sécurité dans les ateliers du pays à la suite de l’effondrement d’un complexe d’ateliers textiles en 2013 qui avait fait plus de 1 100 morts.

L’équipe désignée par l’accord était jusqu’à maintenant en charge d’inspecter les ateliers pour vérifier les conditions de sécurité au Bangladesh. Le pays occupe la place de deuxième exportateur de vêtements finis.

Ce pacte d’une durée de cinq ans aurait dû expirer en mai 2018, mais une période de transition plus longue a été accordée. Les membres de l’accord ont cherché à le faire reconduire, mais leurs tentatives ont été combattues juridiquement par certains propriétaires d’ateliers. Dans le même temps, le gouvernement du Bangladesh a formé son propre organe de contrôle pour reprendre le flambeau.

Dimanche dernier, un tribunal a approuvé le transfert des compétences de l’équipe de supervision des ateliers désignée par l’accord à un groupe mené par l’association des principaux fabricants de vêtements.

Les porte-parole de sept syndicats de travailleurs sont montés au créneau, affirmant ne pas avoir été consultés. Selon eux, cet arrangement pourrait donner trop de pouvoir aux dirigeants d’ateliers, pas toujours enclins à investir dans la sécurité des travailleurs.

« Ce nouvel arrangement va forcément avoir des conséquences négatives sur les conditions de sécurité des travailleurs de l’habillement puisqu’il n’y aura plus d’arbitrage indépendant de la part de l’accord », regrette Babul Akter, le président de la Fédération des Travailleurs de l’Habillement et de l’Industrie au Bangladesh. « Cette décision a été prise sans consulter les syndicats de travailleurs. »

Les syndicats décideront cette semaine des actions de protestation à mettre en place, ajoute Babul Akter.

« Pas le droit à l'erreur »

Le faible coût de sa main d’œuvre a aidé le Bangladesh à se hisser au second rang des producteurs d'habillement derrière la Chine. 4 000 ateliers emploient près de 4 millions de travailleurs dans le pays.

Le Bangladesh fait partie des plus grands exportateurs de vêtements vendus par des entreprises occidentales comme H&M, Adidas et Walmart. Mais l’industrie est touchée depuis des années par des incendies et des explosions de chaudières qui ont déjà fait des centaines de morts.

Une incertitude concernant les normes de sécurité pourrait inciter les marques à rompre les liens avec leurs fournisseurs au Bangladesh.

L’accord a été conclu par des marques européennes avec une fédération syndicale globale, IndustriALL.

Les entreprises peuvent être sanctionnées par des restrictions d’exportation si les normes de sécurité ne sont pas respectées.

Selon Babul Akter, en finir avec cet accord indépendant serait un grand pas en arrière.

Des représentants du gouvernement affirment que l’accord n’est plus nécessaire puisqu’un organe national, la Cellule de Remédiation et de Coordination (RCC), va prendre la relève. Mais l’accord ne pense pas que le RCC soit prêt.

« Selon nous, le RCC n’est pas encore prêt à assumer toutes les fonctions et tout le travail de l’accord », affirme le porte-parole de l’accord, Joris Oldenziel.
Le gouvernement affirme vouloir continuer à assurer la sécurité dans les usines même après le retrait de l’accord.

« Nous n’avons pas le droit à l’erreur… c’est une question de survie », a martelé Mohammad Mofizul Islam, un représentant du ministère du Commerce.

Signé par des marques comme H&M et Benetton, entre autres, l’accord a permis d’améliorer la sécurité dans les ateliers au Bangladesh grâce à des inspections et des allocations de fonds destinés à faire des travaux de modernisation.

« Nous avons le sentiment qu’il ne sera peut-être pas possible pour d’autres d’obtenir les résultats que l’accord a obtenu au Bangladesh », soupire Rani Khan, le secrétaire général du syndicat de travailleurs Mukto Garment Sramik Federation.

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