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15 mars 2022
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Chanvre en France: quel potentiel pour le marché de l'habillement ?

Publié le
15 mars 2022

Alors que les prix du baril de pétrole s'envolent, les matières naturelles ont de plus en plus le vent en poupe. Une tendance qui fait renaître l'intérêt pour le chanvre, jadis omniprésent dans l'industrie textile et qui s'est effacé après-guerre face à l'émergence des matières synthétiques. Autrefois terni d'une mauvaise réputation liée à ses effets hallucinogènes, le chanvre entend retrouver une place au sein de la filière textile grâce à plusieurs coopératives françaises. Un retour en grâce qui pose des challenges techniques, impose une réflexion sur les stocks disponibles, et surtout sur les débouchés textiles possibles pour cette fibre majoritairement destinée à l'alimentaire. Enquête dans les champs de culture tricolores.


Virgocoop


"Nous avons rencontré des marques qui ne voulaient pas entendre parler du chanvre, mais cela a changé", raconte Mathieu Ebbesen-Goudin, cofondateur de la coopérative occitane VirgoCoop, qui entend installer une filière chanvre textile dans la région. "C'est un peu comme pour les légumes: on refusait les produits difformes, alors qu'aujourd'hui c'est presque gage de qualité. Le chanvre a encore des enjeux de régularité, des défauts et grosseurs, mais il répond à une attente réelle des consommateurs qui veulent du naturel, de l'authentique."
 
Fort d'une centaine d'hectares dédiés à la culture du chanvre textile, VirgoCoop fournit à ce jour en chanvre des marques comme Atelier Tuffery, l'allemand Wildling Shoes, Ubac, ou des labels plus jeunes à l'instar d'IFA Chanvre. La coopérative évoque par ailleurs des rapprochements avec d'autres noms du secteur en cours de concrétisation.

Pour Mathieu Ebbesen-Goudin, les marques ont aujourd'hui dépassé l'image du toucher brut longtemps associé à la fibre. "On obtient désormais des touchers très soyeux", souligne le responsable. "Par contre, les titrages des fils font qu'on obtient des tissus lourds, donc davantage destinés à des pantalons et vestes, voire à l'ameublement. Il faudrait du tissage plus fin, comme seuls le font les Chinois pour confectionner les chemises. Mais faut-il que le chanvre remplace toutes les matières? Je n'en suis pas convaincu, car on fait déjà en France de superbes chemises en lin".
 
Fibres sœurs, chanvre et lin font aujourd'hui face à deux réalités bien différentes. En France, 100.000 hectares étaient en 2020 dédiés à la culture du lin, contre 17.900 pour le chanvre, dont l'Hexagone est le premier producteur européen (44.014 hectares en 2020 dans l'UE). Autre distinction d'importance: si 90% du lin français se destine au textile, seul une infime partie du chanvre prend ce chemin.

Ainsi, en 2020, 1.020 hectares sont dédiés en France au chanvre textile par exploitation de la fibre courte, et 64 hectares à la fibre longue (sur les 17.900 hectares, ndlr). Cela laisse donc une marge de progression éventuelle pour le chanvre textile. "Nous sommes à un niveau statistiquement si faible qu’il se situe sous les radars des flux du textile mondial", indique Damien Durand, directeur du pôle Economie de la CELC (Confédération européenne du lin et du chanvre). Il pointe par comparaison le poids de la Chine, qui affiche au moins 12.000 hectares dédiés au chanvre textile en 2020, sous la domination du groupe Kingdom.

"Certains producteurs de lin, agriculteurs et teilleurs de fibres se posent la question de la diversification, en particulier dans le Calvados où de nombreux agriculteurs faisaient de la betterave sucrière, mais dont l’une des unités de transformation s'est récemment arrêtée. Ce qui laisse un espace dans la rotation de la culture", donne en exemple la déléguée générale de la CELC, Marie-Emmanuelle Belzung.

Côté textiles, les filateurs et les tisseurs ont également marqué leur intérêt pour le chanvre. Le chanvre a donc des capacités de développement, tiré par l'appétence actuelle des consommateurs pour toutes les fibres naturelles et végétales. "Il reste à trouver le bon modèle qui réponde à la fois aux attentes des consommateurs et des agriculteurs et industriels textiles", poursuit-elle.

La filière normande multiplie les expérimentations



Le basculement de la betterave vers le chanvre, Henri Pomikal l'a vécu de l'intérieur. A la tête de la coopérative agricole Linière du Nord de Caen, il travaille au développement de l'association Lin et Chanvre Bio, qui multiplie les expérimentations. "C'est en 2018 qu'un voyage chez des filateurs chinois, où l'on file lin et chanvre sur les mêmes machines, m'a ouvert les yeux sur le chanvre", raconte le teilleur. "Si on pouvait arriver à rentrer une autre culture que le lin de printemps et d’hiver, ça optimiserait nos outils de transformation."

Fauchage de chanvre via une faucheuse paralléliseuse par l'association Lin et Chanvre Bio


Après l'expérimentation de machines de récolte amenées de Chine, la coopérative a décroché fin 2021 auprès d'Hervé Morin (député de l'Eure) que la Région finance pour moitié une machine du fabricant Hyler conçue spécialement, et livrée en février 2022.

Pressentant le potentiel de ce marché, le filateur Libeco finance lui une seconde machine. Côté plantes, 30 ares ont fait l'objet d'un test en 2019. Ont suivi 5 hectares en 2020 et 2021, pour notamment affiner la spécificité de la coopérative: le rouissage (séparation fibre/tige) naturel au sol, grâce au soleil.

"On entre aujourd'hui dans une phase semi-industrielle" indique Henri Pomikal, qui indique que ce sont de 100 à 150 hectares de chanvre textile qui vont être pouvoir être récoltés cette année, sur une bande littorale allant de Caen à Bruxelles, dont environ 80 hectares autour de Caen. "La demande peut être phénoménale, la culture exponentielle", estime le responsable. "Mais si vous doublez les surfaces, il faut aussi être en capacité de récolter et transformer davantage. Il faut que les filatures augmentent leurs capacités car, sur un petit marché comme celui-ci, le moindre accroc devient important."

Dans l'Aube, la Chanvrière développe trois types de filage



Un constat que partage Benoit Savourat, dirigeant aubois de la Chanvrière. Une coopérative créée en 1973 où l'on se rappelle des "années compliquées" durant lesquelles le chanvre était boudé, car associé au cannabis.

"De plus, dans les années 90, la mode se moquait de ce type de fibre et délocalisait", se souvient le spécialiste, évoquant l'activité historique dans les composites et le bâtiment. Un premier déclic intervient en 2005, quand le pôle innovation de Lacoste (basé à Troie) caresse l'idée de produire ses polos en chanvre français. "On a travaillé pendant deux ans mais, compte tenu du fait qu'il fallait tout reconstruire, ça n'a pas abouti."


La Chanvrière


Un faux départ qui relance néanmoins l'ambition textile de la Chanvrière. Avec trois axes identifiés. Tout d'abord avoir des fibres adaptées aux filatures de coton. Une activité aujourd'hui majoritaire par laquelle la coopérative fournit en fils chanvre/coton de grands noms du denim, notamment américains. Vient ensuite le recours à des filatures de laine. "Ca n'est pas encore sur le marché, mais c'est en bonne voie, ce qui nous permettra de proposer du 100% chanvre", indique Benoit Savourat. Et enfin le recours à des filatures au mouillé destinées au lin, mais qui pose le même problème de mode de récolte qu'aux confrères normands, et les mêmes déconvenues avec les machines chinoises.

Fort à ce jour d'un prototype de machine du belge Cretes, la Chanvrière a produit une dizaine d'hectares de chanvre textile l'an passé, et vise les 150-200 hectares en 2022. Pour l'heure, une paille parmi les 11.000 hectares de chanvre récoltés par la coopérative via ses 680 adhérents. Mais pour son président, ce n'est qu'un début. "En vingt-cinq ans, je n'ai jamais vu un engouement aussi fort", indique-t-il à FashionNetwork.com, pointant que, en attendant des fils 100% chanvre, les marques peuvent déjà s'appuyer sur le chanvre/coton. "On est en train de recréer quelque chose qui avait disparu. Tout réapprendre demande du temps. Mais on y vient!", relève le responsable.

 Quelle structure pour la filière chanvre?



De VirgoCoop à La Chanvrière en passant par la coopérative Linière du Nord de Caen, on en reste persuadé: l'évolution de la demande va dans le sens du chanvre, dont la faible consommation en eau rejoint les nouvelles attentes en termes d'écoresponsabilité. Se pose de fait la question de développer une stratégie au niveau national, voire européen. Avec des ponts potentiels vers d'autres filières tricolores.

A l'occasion d'un test, le chanvre défibré localement par VirgoCoop s'est ainsi déjà marié, dans une filature d'Ariège, à une laine occitane. Laine produite via Tricolor, autre projet de renaissance de filière, et traitée par les établissements Laurent, à Saugues, en Haute-Loire, dernier lavage important de laine en France.


Virgocoop


Plus évident encore est le pont vers l'industrie du lin. "La question pour la filière textile lin est, pour l’instant, de savoir si le chanvre doit être une diversification ou pas", explique Marie-Emmanuelle Belzung, "sachant qu'aujourd'hui, dans le domaine du textile, ce sont plus de 40 pays qui produisent au niveau mondial du chanvre, avec en leader la Chine, contre moins de 10 pays pour le lin, avec l’Europe de l’Ouest qui pèse 80% de la production mondiale".

La dirigeante de la confédération indique que la CELC travaille actuellement à un état des lieux du chanvre européen et mondial, en concertation avec les différents acteurs économiques du chanvre. Une base de réflexion pour une stratégie future. "Est-ce que la CELC doit mettre son expertise lin au service du chanvre textile et fédérer les entreprises du chanvre textile? Est-ce que l'enjeu économique en vaut la chandelle? La seule certitude, c'est que si la CELC se lance, cela sera avec une stratégie européenne de fibre textile. Avec la même approche durable que pour le lin", précise la responsable.

Si le potentiel est là, le chanvre textile français doit donc encore structurer et massifier sa production. Le tout, à l'heure où l'appétence de marques et consommateurs pour les matières naturelles n'est plus à démontrer. Avec la flambée des prix du pétrole, essentiel aux fibres synthétiques, cette appétence qui pourrait connaître un coup d'accélérateur.

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