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Publié le
29 mars 2023
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5 minutes
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Circularité: quels freins au recyclable ressortent du gisement textile collecté en France?

Publié le
29 mars 2023

Pour mieux comprendre la composition des matériaux collectés pouvant alimenter la filière du recyclage textile, l'éco-organisme tricolore Refashion lançait en avril 2021 un programme d’analyse de composition des flux entrants et sortants des centres de tri conventionnés en Europe. Une étude qui met en perspective les matières et mélanges les plus collectés, ainsi que les freins au recyclage que sont les multicouches, les perturbateurs et les coloris des teintures.


Shutterstock


Présentée mercredi 29 mars aux acteurs du recyclage, l’étude se base sur l’analyse par le cabinet d'études Terra de 122 tonnes de textiles collectées, représentant quelque 720.000 pièces.

Il ressort dans un premier temps que 10,9% des produits collectés ne sont pas des TLC (textiles, linge de maison et chaussures). Il s’agit généralement de maroquinerie (23,8% des non-TLC), coussins et couettes (15,1%), ou encore tapis, livres, jouets, chutes de tissus.

Sur les 89,1% restants, 79,7% des quantités collectées sont des vêtements (171g en moyenne par pièce), contre 10,5% de chaussures (475g en moyenne par paire) et 9,8% de linge de maison (282g).

"L'objectif est d'avoir un gisement caractérisé", explique Véronique Allaire-Spitzer, responsable du pôle régénération de Refashion. "La filière textile a pour difficulté d'avoir une immense variété de produits, du string aux doudounes. Il faut donc connaître la nature du gisement pour identifier comment le recycler", souligne l'experte. Elle indique une accélération de la demande de matériaux recyclés de la part des entreprises, incitées en ce sens par la loi Agec.

Premier constat parmi les pièces collectées: entre 2022 et 2023, le poids total des vêtements collectés a chuté de 7,5%, et le nombre de pièces de 10,9%. Un repli à lire à l’aune de la concurrence des portails de seconde main, dont l’effet sur la collecte a récemment poussé Emmaüs à lancer une campagne directement sur Vinted.

Les pulls seraient les pièces les plus collectées, avec une part de 14,6%, devant les bas (pantalons, shorts, jupes…), les t-shirts, et les pièces à manches comme les vestes, manteaux et costumes. Jeans, accessoires et sous-vêtements (hors lingerie), robes ou chemises sont moins présents. De même que les sneakers (2,5% du total), bottes et bottines (2,4%) ou chaussures basses (2,1%).

Que deviennent les matériaux non réutilisables?



Parmi les pièces collectées, un peu moins de la moitié ne peut-être réparée ou envoyée sur le marché de la seconde main. Pour ces pièces, au nombre de 74.000 (et 14,6 tonnes) sur l'échantillon observé, plusieurs chemins sont possibles: elles sont recyclées par effilochage (récupération des fibres) ou essuyage (transformée en chiffons industriels), ou bien transformées en combustibles solides de récupération (CSR) ou gérées comme “déchets ultimes” (incinérés ou enfouis).

L’étude se penche spécifiquement sur les matières effilochables ou défibrables. Parmi toutes ces fibres réutilisables, Refashion constate que le coton domine avec 43% du total, loin devant le polyester avec 19%. Situation inversée par rapport aux quantités de fibres produites mondialement pour l'ensemble des destinations du textile (habillement, automobile, construction...).

"Nous n'avons pas d'explication pour justifier ce décalage", indique Véronique Spitzer, qui donne cependant des pistes: "Déjà, nous ne connaissons pas la datation des tissus collectés, qui peuvent dater d'hier ou d'il y a cinquante ans. Par ailleurs, les tissus techniques sont généralement plus résistants, avec donc des pièces plus facilement réutilisables."

Au classement arrivent ensuite l'acrylique (12%), la viscose (6%), la laine (5%) et le polyamide (4%). Et c
hacun a son propre devenir: “Le coton est ultra dominant dans le flux essuyage. C’est également la matière dominante des flux d’effilochage et des déchets ultimes”, indique Refashion. “Le polyester est la principale matière dans les flux CSR et il est aussi surreprésenté dans les déchets ultimes. L’acrylique et la laine sont eux surreprésentés dans le flux effilochage”.

45% de matières mélangées



Aux matériaux identifiés s’ajoutent 8% de matériaux inconnus. L’absence d’étiquettes (ou leur inexactitude) et les limites de l’analyse par spectrographie restreignent l’identification de certains mélanges de matières. Or ces mélanges représentent à eux seuls 45% du gisement.


Principales compositions (représentant 95 % du gisement en poids).Jaune = matière pure. Rose = mélange bi-matière.Bleu = mélange à trois matières ou plus - Refashion



"Il y a eu beaucoup de progrès dans le recyclage des mélanges, notamment à destination du marché des isolants, qui en est très friand", souligne Véronique Spitzer. L'experte pointe cependant que la séparation des matériaux composant les mélanges reste limitée, l'absence de solutions mécaniques ne laissant que des solutions chimiques. "Des technologies sur lesquelles nous n'avons pas encore d'étude d'impact environnemental".

En attendant des progrès dans ce domaine, parmi les mélanges les plus identifiés ressortent pour l'heure polyester/coton avec 8,8% du gisement, coton/élasthanne (4,9%), laine/acrylique (3,1%) et coton/acrylique (2,3%).

“À noter que les articles qui sont composés à plus de 90% de matières synthétiques (polyester, polyamide, acrylique, élasthanne) représentent 24% des vêtements et du linge de maison qui ont été analysés”, souligne le rapport, qui pointe par ailleurs que le coton est généralement la matière dominante des mélanges.

Multicouches, perturbateurs et problèmes de couleurs



Trois problèmes se posent quant au recyclage des textiles non réutilisables: le recours à des matériaux multicouches, la présence de perturbateurs (zips, boutons, perles…), et la question des couleurs. Or, si seulement 8,5% du gisement analysé se compose de multicouches, la grande majorité des tissus monocouches collectés présente des perturbateurs. 

“Les articles les plus simples à recycler (monocouche et sans perturbateur) représentent moins d’un quart du gisement (22%)”, déplore ainsi Refashion, qui milite notamment pour que la recyclabilité des produits soit prise en compte dès la conception des pièces.


Compositions des pièces collectées non-réutilisables sur la marché de la seconde main, par destination - Refashion



Pour recréer du fil à partir de fibres récupérées sur d’anciens vêtements, la question de la couleur reste clef. Et ceci malgré l’émergence progressive de procédés de neutralisation des couleurs ne fragilisant pas les fibres.

En attendant, Refashion constate que le noir (17%), le blanc (16%), le bleu (15%) et le gris (12%) sont les tons les plus collectés parmi les pièces non réutilisables. A ceux-ci s’ajoutent 16% des matériaux multicolores, qui posent leur propre défi au secteur du recyclage.


En 2021, 2,8 milliards de pièces d’habillement, linge de maison et chaussures ont été mises sur le marché (produites ou importées) en France, pour 715.290 tonnes de biens. Dans le même temps, 244.448 tonnes ont été collectées, soit 34% du gisement annuel. Refashion, financé par les metteurs en marché, avec l'agrément renouvelé de l’Etat, cible la collecte de 300.000 tonnes par an via 66 centres de tri conventionnés.
 

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