Les enseignes adhérentes de l’Union du Grand Commerce de Centre-Ville, comme les Galeries Lafayette, C&A et le Printemps, et celles adhérentes de la Fédération des Enseignes de l’Habillement, soit la plupart des chaînes spécialisées d’habillement, ne semblent pas avoir grand souci à se faire à regarder leur poids sur le marché français.

Globalement, les deux fédérations pèsent 410 entreprises, avec un chiffre d’affaires de 28 milliards d’euros et emploient pas moins de 180 000 personnes. Surtout, elles représentent selon des chiffres FEH, près de 43 % des ventes du secteur, 38 % pour les chaînes et 5 % pour les grands magasins et magasins populaires. Les indépendants, qui suivent, se situent à 17 %, donc loin derrière. Bien sûr, de mois en mois, l’évolution de leurs chiffres d’affaires peut varier mais globalement personne ne doute de l’importance de leur situation sur le marché français... Sauf eux ?

En organisant un premier colloque depuis le rapprochement de la FEH et de l’UCV, ils n’ont en tout cas pas dissimulé leurs doutes sur leur business model. Tout en prêtant une oreille attentive aux interventions des consultants et autres observateurs se succédant à la tribune pour expliquer le comportement du consommateur et les moyens d’y répondre. Premier à ouvrir le bal, Yvon Merlière, directeur général du Credoc, pouvait se baser sur une enquête en cours auprès d’acteurs distributeurs, institutionnels, experts à qui le Credoc demande leur vision de l’avenir du commerce à l’horizon 2020. Courant décembre, le Credoc publiera l’ensemble des données recueillies.

Première remarque: de nouvelles formes de commerce émergent, liées aux mutations de la société. L’enquête révèle aussi l’importance des évolutions technologiques et notamment du e-commerce pour les professionnels.
De leur côté, les institutionnels et les experts privilégient plutôt l’impact du développement durable. Plus largement, tous les acteurs relèvent un poids grandissant du rôle des consommateurs ainsi que celui du e-commerce dans les changements en cours et à venir. Yvon Merlière souligne ainsi une plus grande orientation client du commerce à travers, par exemple, la relation de confiance, le développement du service. Une idée qui progresse aussi: le goût du consommateur pour des magasins plus petits et plus proches, de proximité.

De gauche à droite Georges Plassat, PDG de Vivarte, Philippe Houzé, président du directoire du groupe Galeries Lafayette, Pierre Mestre, président du directoire de Groupe Orchestra et Jean-Noël Reinhart, PDG de Virgin Megastore

Plutôt rassurant, Marc Filser, professeur en sciences et gestion à l’université de Bourgogne, a en fait relevé, de son côté, qu’aucune nouvelle formule de distribution n’en a fait disparaitre une autre. Même si Philippe Houzé, président du directoire du groupe Galeries Lafayette, rappelle que certains rêvaient de transformer les grands magasins en dinosaures. Marc Filser a ainsi pu souligner les formidables leviers de croissance que se sont donné les entreprises de la distribution spécialisée. Comme la logistique à flux tendus, l’organisation intégrée et aujourd’hui le multicanal. Il constate ainsi que le commerce organisé a pris en vingt ans une part croissante dans la conception des produits. "Les marques de distributeurs sont devenues des marques reconnues par les consommateurs", explique-t-il. Selon l’enquête de la société de conseil stratégique OC&C, réalisée cette année, les Français placent 7 enseignes du commerce organisé parmi les 10 qu’ils préfèrent dont Ikea, Décathlon, Nature et Découvertes et Sephora.

Avec l’intervention de Cédric Ducrocq, président de la société de conseil Dia-Mart, les 200 chefs d’entreprise présents ont pu être aux anges. Celui-ci s’est dit bien plus positif sur l’évolution de la distribution spécialisée française qu’il y a quelques années. "Manifestement, nombre d’acteurs ont su faire de bons choix". Mais lesquels donc ? Pour Cédric Ducrocq, c’est concilier les prix bas avec plaisir et confort d‘achat, l’hyper stimulation et le développement durable, l’industrialisation et l’humanisation, jusqu’au multicanal qu’ont investi nombre d’enseignes. Selon celui-ci, les distributeurs spécialisés ont ainsi en quelque sorte bien anticipé le changement de cycle et les nouveaux comportements des consommateurs.