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21 nov. 2017
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Commerces de centres-villes : la majorité se divise autour d'un abattement foncier

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21 nov. 2017

Les députés de l’opposition ont, le 17 novembre, fait adopter un amendement devant permettre aux villes d’aider fiscalement les petits commerces face aux grandes surfaces de périphérie. Mesure qui doit au passage compenser la hausse attendue des impôts locaux après le réajustement sur dix ans des bases de calcul de la taxe foncière. Mais, pour le gouvernement, le texte ne fait qu’accroître la distorsion existant par ailleurs entre commerce physique et en ligne.

Benjamin Griveaux, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Economie et des Finances - AFP


L’amendement 1710 rectifié, proposé par le MoDem dans le cadre du Budget 2018, a été voté à 33 voix contre 16 par les élus MoDem et LR, les groupes Nouvelle Gauche et Gauche Démocrate et Républicaine, mais aussi avec le soutien d’élus LREM. Il donne la possibilité aux communes de décider un abattement allant jusqu’à 15 % sur la taxe foncière pour les commerces de moins de 400 m². Et ouvre la possibilité de moduler davantage le coefficient s’appliquant à la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom), qui s’applique sur les surfaces plus grandes, généralement installées en périphérie.

« Cet amendement vise à rétablir un équilibre en prévoyant un double mécanisme », a expliqué dans l’hémicycle le député MoDem Marc Fresneau, selon le compte rendu de séance. « Elle n’a de coût budgétaire ni pour les collectivités territoriales ni pour l’État, puisqu’il sera possible de compenser en interne la perte de recettes liée à la diminution de la taxe foncière (…). L’objet n’est pas d’alourdir la fiscalité des grandes surfaces : il est de rééquilibrer un effet de la réforme des valeurs locatives, dont la conséquence est qu’elles seront assujetties moins lourdement, tandis que les commerces de centre-ville le seront plus lourdement. »

« À mon avis, c’est un mauvais combat, car ce n’est pas ce qui réglera le problème de la revitalisation des commerces de centre-ville dans les villes moyennes ou dans les centres-bourgs, sur lequel nous avons commencé à travailler, a déploré le secrétaire d’Etat, Benjamin Griveaux. Je doute que l’introduction d’une distorsion de fiscalité en fonction des tailles de surfaces commerciales soit une partie de la solution aux difficultés rencontrées par les commerces de centre-ville, qui tiennent au moins autant à des problèmes de connectivité ou de transport, lesquels ne sont pas directement liés à l’activité commerciale. Les plateformes du e-commerce ne sont pas soumises à la TASCOM, ou de façon très marginale. Votre proposition reviendrait à les favoriser. »

« Ce n’est pas parce qu’il y a une concurrence entre l’e-commerce et le commerce traditionnel qu’il ne faut pas régler le problème des inégalités existantes entre les commerces de centre-ville et les grandes surfaces », a répondu la députée LR Véronique Louwagie. « Je suis choquée par votre volonté de supprimer des possibilités laissées aux collectivités territoriales. Il faut les laisser vivre, organiser le dynamisme et la vie sur les territoires. Nos élus locaux sont les mieux placés pour le faire. »

« Coller à la réalité locale »

« Si les arguments de Marc Fesneau sont utiles pour nourrir nos discussions, il ne faut pas oublier que la question de l’emploi dans les territoires est tout aussi importante, voire prioritaire, pour la député LREM Amélie de Montchalin. Or je suis attentive aux propos du secrétaire d’État selon lesquels il est essentiel que nous ne renforcions pas la concurrence entre des structures qui, sur nos territoires, créent de l’emploi. L’autonomie des élus locaux ne doit pas pouvoir jouer contre l’emploi local. »

Mais pour Christophe Jerretie, également député LREM, il s’agit justement d’un enjeu d’aménagement du territoire. « Nous avons besoin d’accompagner la revitalisation des territoires et la disposition proposée est, à cet égard, un outil juridique utile. Je ne pense pas qu’elle ait beaucoup d’impacts sur la concurrence entre les différents types de commerce, mais elle ouvre une possibilité aux collectivités, qui ont aujourd’hui peu de libertés en la matière. »

« On peut toujours se demander si un amendement de cette nature est une erreur : je ne le crois pas, pour Eric Woerth, président LR de la Commission des finances. Personne ne pense évidemment que cet amendement résoudra tous les problèmes (…). Le jour où nous considérerons qu’une grande plateforme numérique est assimilable à une grande surface commerciale et que les actifs numériques peuvent être comparés à des actifs fonciers, alors peut-être réussirons-nous à (…) mettre à armes égales les secteurs qui utilisent le numérique. C’est un autre sujet. C’est pourquoi il n’est pas possible de refuser des amendements qui collent à la réalité locale. »

« Certes, l’e-commerce a une marge de progression évidente, mais les petits commerces de centre-bourg et de centre-ville, y compris en banlieue, souffrent aujourd’hui énormément de la concurrence des grandes surfaces de la périphérie, a commenté Hubert Wulfranc, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Renforcer l’autonomie fiscale des communes en la matière donnera à ces dernières la liberté de mener une politique commerciale de proximité. Pour toutes ces raisons, nous voterons cet amendement. »

Après validation du texte en première lecture par l’Assemblée nationale le 21 novembre, le projet de Loi de Finances pour 2018 sera théoriquement mis au vote au Sénat le 12 décembre, avant adoption définitive par l’Assemblée au plus tard le 22 décembre.

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