Matthieu Guinebault
7 sept. 2015
Crise chinoise : les industriels face à un « retour de flamme » ?
Matthieu Guinebault
7 sept. 2015
L’incertitude était grande cet été autour de la santé de l’économie chinoise. Le fluctuant yuan agirait comme un accélérateur du transfert des productions asiatiques. Ce qu’explique Dhyana van der Pols, spécialiste du sourcing textile de Nash International, à l’occasion du salon Sourcing Connection Première Vision.
FashionMag.com : Comment les commanditaires réagissent-ils à cette crise chinoise ?
Dhyana van der Pols : Les donneurs d’ordres sont en train de se préparer à du « shadow sourcing », à répartir la production de certains produits entre différents pays. Les études montrent que les commandes menées en Chine sont amenées à reculer de 5-10 %. Mais ce mouvement n’est pas né de stratégies récentes, mais de celles mises en place voilà près de quatre ans. Le Bangladesh et le Vietnam en sont les principaux bénéficiaires pour l’heure. Si vous prenez les choses d’un point de vue géopolitique, les Chinois produisent davantage pour leur marché domestique, et l’ensemble de la région, principalement tournée vers le marché américain, va profiter de l’accord de libre-échange transpacifique (dont la Chine est exclue, ndlr). Donc nous ne sommes pas au bout du changement.
FM : La crise profite donc aux voisins de la Chine ?
DVDP : Le Vietnam n’est plus une alternative suffisante. Les marques se tournent maintenant davantage vers le Bangladesh ou le Pakistan, qui double sa croissance chaque année. Et non plus uniquement dans le denim, mais également dans le sportswear et d’autres secteurs à présent. L’ensemble des pays se sont très fortement professionnalisés. La transition des productions de la Chine vers d’autres pays n’est, comme on le sait, pas nouvelle. Mais les récents événements, et l’inquiétude qu’ils génèrent, vont amener cette transition à se faire sur un rythme accéléré.
FM : Un retour en grâce de la production chinoise est-il envisageable ?
DVDP : Tout le processus actuel a été lancé il y a huit ans. Et cela parce que les fabricants chinois n’étaient pas flexibles. Ils imposaient des commandes massives, avec par exemple 10 000 pièces quand seulement 3 000 étaient nécessaires. Que voulez-vous qu’une marque face des 7 000 en trop ? Et c’est toujours un problème aujourd’hui. Même pour de grandes marques comme Nike ou Gap. L’industrie chinoise a connu un retour de flamme. Ils ont fini par comprendre la nécessité d’être flexible et avaient déjà perdu beaucoup de commandes. Il y a cinq ans, la chute est allée jusqu’à 40 % en deux mois. Donc les fabricants ont repris le chemin des salons, pour damer le pion aux Bangladais et Pakistanais. Mais ils ont loupé le coche car, entre-temps, d’autres pays sont devenus plus compétitifs.
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