
Dominique Muret
27 sept. 2012
Défilés à Milan : une mode sous influence

Dominique Muret
27 sept. 2012
La semaine de la mode, qui vient de s’achever à Milan, s’est révélée très pragmatique avec d’habiles collections de prêt-à-porter féminin confectionnées pour contenter tout le monde. Très orientées en particulier vers les nouveaux marchés. Plusieurs collections, inspirées notamment par l’Asie et le Japon, n’ont pas hésité en effet à faire des clins d’œil appuyés vers ces naissants eldorados du luxe.

Prada, dont le groupe est coté à la Bourse de Hong Kong, a conçu par exemple une garde-robe très japonisante, où se mêlaient avec subtilité passé et modernité. Les mannequins endossaient d’élégants manteaux en shantung brodés de fleurs chaussées des traditionnelles chaussures-chaussettes "jika tabi" revues en version futuriste. Etro a proposé pour sa part des vestes kimono et des ensembles pantalons de judokas, tandis que d’autres, comme Emilio Pucci, se sont inspirés des peintures de la Chine ancienne avec des robes brodées de dragons.
Le motif floral, en particulier peint sur soie, mais aussi brodé, appliqué en tissu ou cuir à la main, repris dans des dentelles mixées à du macramé ou dessiné dans du coton perforé, s’inscrit résolument comme le leitmotiv de la prochaine saison estivale.
Du minimalisme à l’opulence, du mini au maxi, du noir et blanc à la couleur, des imprimés aux teintes unies… Les couturiers milanais ont joué à fond la carte du contraste pour capter le public le plus large, écartant définitivement denim et sportswear de la garde-robe féminine. Ils ont tout pointé aussi sur l’image, avec des collections construites le plus souvent autour d’une seule et unique idée, déclinée ensuite en de multiples nuances et variations.

Côté minimaliste, les stylistes se sont focalisés sur les robes très courtes à la ligne en A ou en forme de trapèze. Une coupe reprise aussi dans certains pantalons coniques courts et très larges. Ou dans les manches kimono. Grand succès aussi pour les petites robes évasées années 1950 et pour les ensembles bien sages en coton blanc, la broderie de Saint Gall prenant du galon pour l’été prochain.
Ce retour à la simplicité se traduit surtout dans l’utilisation des "non couleurs" avec une prédominance de looks totalement blancs, s’alternant au noir, comme chez Gianfranco Ferré dont toute la collection se décline en noir et blanc. Noir et blanc étant accostés aussi dans des mises bicolores en contraste. Simplicité encore dans le recours à la teinte unie avec de nombreux modèles monochromes. Pour le reste, la palette de l’été prochain ne devrait pas en décevoir beaucoup, puisqu’elle varie des couleurs intenses (fuschia, bleu électrique) aux teintes pastel et poudrées, avec l’arrivée remarquée du jaune lime ou jaune poussin, du mandarine abricot et du vert opaline. Les stylistes continuent de s’amuser par ailleurs avec les effets de transparence et de peau nue exploitant les tissus élastomères couleur chair utilisés comme une deuxième peau.

Dans cette veine minimaliste se distingue la géométrie des formes et des éléments graphiques repris dans de nombreux modèles (Marni, Fendi, Jil Sander). Les quadrillages losanges style arlequin sont partout. Ce nouveau vestiaire se contente de peu de pièces. A côté de la robe incontournable, qui reste et perdure comme pièce phare, apparaissent deux nouveaux éléments: la tunique, blouse ou top très léger en soie, qui se portent court sur le devant et se prolongent en traîne dans le dos et l’ensemble-pantalon ample et fluide proposé lui aussi dans des matières soyeuses. A noter, l’intrusion de la robe-nuisette ultra-light qui s’enfile volontiers aussi sur des pantalons.
Soie, organza, gazar, crêpe de chine, shantung ainsi que lin et coton croquant sont omniprésents. Souvent entremêlés à de la dentelle ou du cuir. La peau (python, lézard, nappa d’agneau) constitue l’autre grande matière incontournable de l’été prochain. Fendi, Marni et Trussardi, entre autres, ont mis à contribution l’habileté exceptionnelle des artisans italiens pour réaliser de magnifiques habits dans des peaux teintes, coupés franc.

Ce côté artisanal, valorisant le grand savoir-faire des petites mains du Made in Italy, constitue le deuxième axe porteur de ces collections milanaises, qui misent tout sur la richesse et les détails. Dolce & Gabbana s'est distingué notamment avec d’inédites robes tissées en raphia, façon toile de jute, incrustées de décorations en corail et des modèles de robes-bustiers en rotin valorisant l’art de la vannerie sicilienne.
Au rayon des accessoires, le hit de l’été prochain sera la minaudière, le sac miniature de soirée qui tient dans la main, proposé aussi en version boite métallisée, vu absolument sur tous les podiums.

Dans cet esprit festif s’inscrivant en opposition au filon minimaliste, de nombreux couturiers ont joué la carte de l’opulence avec des robes féériques et des habits de lumière couverts de strass, cristaux, sequins, perles et autres paillettes. Dans cette course à l’excès, Giorgio Armani est allé jusqu’à représenter la voûte céleste en faisant tournoyer les planètes autour de ses modèles. Un triomphe scintillant de décorations iridescentes, broderies dorées et autres tressages complexes de diverses matières. Pas forcément du goût des acheteurs, comme en témoigne Michele Giglio, détenteur d’une dizaine de boutiques à Palerme: "J’ai vu à Milan plus d’acheteurs chinois qu’italiens ! De fait, les stylistes n’ont pensé qu’aux marchés étrangers. Plus de 90% de leurs propositions étaient centrées sur le soir avec tenues de soirées et robes pour grandes fêtes. Invendables pour nous !"
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