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Publié le
7 juin 2023
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Emmaüs Campüs déploie à Paris une stratégie associative moderne

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Publié le
7 juin 2023

Désormais, la mode seconde main côtoie la fast-fashion au forum des Halles. Emmaüs Campüs est installé depuis la mi-février dans le centre commercial parisien, dans le cadre d'une stratégie d'adaptation face à de nouveaux défis.


Emmaüs Campüs au Forum des Halles - Samuel Gut



Avec son nom équivoque, le projet associatif, affilié au chantier d’insertion Emmaüs Défi, vise précisément les étudiants soumis à la précarité. Ces derniers bénéficient de -30% sur une catégorie d’article différente chaque mois dans la boutique des Halles, située au niveau -1..

Selon l'une des deux responsables de la boutique, la clientèle est composée à 45% d’étudiants depuis l’ouverture. Ces derniers ne sont effectivement pas les seuls à franchir les portiques. Des personnes âgées, des mères et pères de famille parcourent aussi les rayons pour débusquer une pièce intéressante. “Le trafic dépasse nos attentes, nous sommes surpris. Je pense que le bouche à oreille à bien marché”, souffle-t-elle.

Sur les 325 mètres carrés du magasin sont disposés des objets de déco, de petits appareils électroniques et des jouets, mais surtout des vêtements pour hommes, femmes, enfants, et des accessoires. Un petit corner met en avant des vêtements et des accessoires upcyclés. Ils sont créés en partenariat avec Frip’Insertion et le Relais Val de Seine, à partir de tissus donnés par des entreprises partenaires. “Le corner est petit mais il marche bien. Il est régulièrement renouvelé”, s’enthousiasme Amélie Desprez, responsable de la communication de Emmaüs Défi.

La jeune femme observe un joli démarrage pour la nouvelle boutique Emmaüs Campüs : “Trouver un Emmaüs hyper accessible en plein centre de Paris, c’est super. C’est une manière de toucher ceux qui n’achètent pas de seconde main.” L’équipe est consciente que les modes de consommation changent. “Beaucoup viennent car ils ont conscience de leur impact environnemental. Aujourd'hui, on a une réponse à plein de problématiques qui convergent, et on montre la voie”, analyse Amélie.


Les employés sont en voie d'insertion professionnelle - Samuel Gut



Emmaüs Campüs, créé en 2021, est d’ores-et-déjà une machine bien huilée. L’objectif, c’est que la boutique finisse par s'auto-alimenter. Pour l’heure, deux circuits de collecte existent. Dans un premier cas, les gens apportent leurs dons directement dans la boutique Emmaüs Campüs. Le tri se fait sur place, en arrière boutique. Quatre à cinq portants de vêtements sont ainsi donnés chaque semaine. S’il y en a trop, ils sont envoyés dans un centre de tri dédié, à Rosa Parks, dans le Nord-Est de Paris. Le deuxième circuit consiste à collecter les dons avec les deux camions Emmaüs Campüs, et amener les vêtements dans le centre de tri. Là, 17 employés en insertion s’occupent de décharger les camions, de trier et de plier les pièces récoltées.

La boutique des Halles emploie 15 employés en insertion, que chapeautent deux encadrantes, et sert à financer les aides que leur apporte Emmaüs Défi. Leur contrat prévoit 26 heures de travail par semaine. À côté, ils bénéficient d’un accompagnement socio-professionnel qui comporte des cours de français, une aide administrative, de santé, etc.

Nouveaux défis économiques



Toutefois le modèle doit faire face à des freins. Les membres d’Emmaüs Défi constatent une baisse de la quantité et de la qualité des dons. Pour eux, c’est la conséquence directe de l’essor des plateformes de seconde main, comme Vinted, mais aussi de la popularité de la fast-unfashion, dont beaucoup de produits sont de piètre qualité. Enfin, l’augmentation des prix de l’habillement pousse les gens à porter plus longtemps leurs vêtements, et les donnent lorsqu’ils sont vraiment usés. Résultat, moins de dons, mais aussi des vêtements récupérés trop usés pour être revendus. Dans ce cas là, Emmaüs Défi en fait don à d’autres associations ou les envoie au recyclage.

Amélie Desprez évoque également la loi Agec, qui interdit aux entreprises de jeter les produits non-alimentaires pour s’en débarrasser. “Ils ont transformé ça en loi économique en écoulant leurs invendus à moindre coût, au lieu de les donner aux associations et ressourceries. Nous avons au final moins de gisement pour financer nos actions sociales. Chez nous, tout est réinjecté dans nos projets : démarches administratives, achat de matériel, cours de français et formations pour les gens en insertion.” 


Emmaüs Défi observe une baisse importante des dons - Samuel Gut



Emmaüs Campüs s'étend et modernise sa stratégie



Pour trouver une solution, les membres de l’association peinent à trouver des idées. “On n’a pas de stratégie particulière. Mais la communication fonctionne. Notre dernière campagne sur Vinted a alerté certaines personnes, qui sont venues ici pour donner”, explique l'un d'entre eux. Emmaüs avait créé un compte Vinted, @emma_us. Sur les fausses annonces, des vêtements estampillés du slogan : "Si tu ne le portes pas, donne-le". Après les marques, c’est au tour des associations de renforcer leur message au travers de la communication.

En attendant de trouver une réelle parade à cette baisse des dons, Emmaüs Campüs continue de s’étendre dans la capitale. Une deuxième boutique se situe dans le XIIIe arrondissement. Amélie Desprez explique : “On voudrait en ouvrir d’autres. Peut-être une d’ici la fin de l’année, dans le quartier de Censier, dans le Ve arrondissement.” L'Université Sorbonne sera déménagée près de la place de la Nation cet été, et remplacée par un tiers lieu. Une boutique y est réservée pour Emmaüs Campus.

Améliorer sa logistique est un autre défi de taille. L’association collabore désormais avec deux sociétés de livraison de courses et de colis alimentaires, Flink et Delivered. Il y a quelques mois, Flink a approché Emmaüs Défi en leur proposant de récupérer des vêtements ou objets à la livraison de leurs produits. De son côté, Delivered livre les dons de Emmaüs Défi, en même temps que ses produits, depuis un an. 

Alors que les crises s'enchaînent et accentuent la précarité, l’association utilise la communication et les nouveaux modes de consommation pour espérer rester dans l’ère du temps. En 2022, Emmaüs Défi a donné 10 tonnes de vêtements. Le projet Emmaüs Campüs emploie une quarantaine de personnes et les accompagne dans leur insertion professionnelle.

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