Gunther, Henrik Vibskov et Arturo Obegero: le triomphe du menswear indépendant
Ces trois marques de mode masculine font leur chemin avec indépendance, apportant différentes visions créatives lors de leurs présentations pendant la dernière semaine de la mode masculine parisienne. Malgré des propositions esthétiques et des univers complètement différents, la marque française Gunther, la Danoise Henrik Vibskov et l’Espagnol Arturo Obegero ont un point commun: une trajectoire et une inspiration résolument alternatives.

Gunther vise l’étranger
La créatrice française Naomi Gunther a fondé sa propre griffe de mode masculine haut de gamme en 2019, quelques mois seulement avant le début de la pandémie. “La marque a déjà quatre ans, mais elle n’en a réellement vécu que deux“, sourit la jeune designer, interviewée par FashionNetwork.com. Elle s’est formée à la Parsons School of Design.
Ce label identifié streetwear emprunte quelques codes à l’univers du costume masculin et mise sur une production faite en France, en circuit court. Son atelier créatif et de production est installé à Paris. Jusqu’à maintenant, tous ses défilés ont aussi eu lieu dans la capitale française, en marge du calendrier officiel de la fashion week. “C’est le format que je préfère, celui qui me laisse le plus de liberté créative. En plus, cela me permet d’agrandir ma communauté, de faire des présentations originales et d’aller un peu plus loin dans l’expérience à chaque fois“, explique Naomi Gunther.
Son dernier show a été présenté au Roméo Club, boulevard Saint-Germain, recréant un spectacle dans une discothèque à 17 h, avec des invités massés autour du podium. Intitulée “Walk of Fame“, la collection recréait une ambiance californienne, avec “des touches chics de Los Angeles, une décontraction propre à Venice Beach et une atmosphère digne d’un spectacle à Las Vegas“. Un cocktail de références détonantes, traduit par des costumes en jean et en velours avec des coupes évasées, des ensembles légers en soie ou des looks complets à imprimés graphiques pour proposer “des costumes décontractés s’éloignant du streetwear“.
Une identité que la créatrice entend bien renforcer en se taillant une réputation de “marque de menswear imaginée par une femme“, offrant une garde-robe masculine que “les femmes aussi peuvent s’approprier pour se différencier“. Visiblement, l’offre séduit et a récemment connu un beau succès à l’étranger. Commercialisée dans un multimarques de Dubai Mall depuis trois saisons, la maison parisienne a participé à un salon à Séoul en février dernier avec le soutien du dispositif Mode in France. Elle a ainsi pu entrer sur le marché coréen via le club DFD et travaille aujourd’hui avec un showroom dans la région. En parallèle, Naomi Gunther est actuellement en pourparlers avec Amazon Fashion et vise une expansion aux États-Unis.
En France, cette griffe indépendante distribue ses collections en ligne sur sa propre e-boutique et sur la plateforme des grands magasins Printemps. Elle développe aussi une production personnalisée et sur mesure dans son atelier parisien. Apparemment, la demande “est en augmentation constante“.

Henrik Vibskov fête ses 20 ans à Paris
À quelques pas du Panthéon, le créateur danois Henrik Vibskov avait installé un ring de boxe estival dans la cour ensoleillée du Lycée Henri-IV à l’occasion du vingtième anniversaire de sa présence en France. Un maître de cérémonie jouait aussi le rôle de présentateur de boxe pour présenter les participants de chaque combat et s’occupait également de sonoriser la performance. Les silhouettes du créateur danois (seul représentant scandinave figurant au calendrier officiel de la semaine de la mode parisienne) ont défilé parmi entre des banderoles orange fluo rendant hommage à l’univers du sport.
Utilisant plus de 80% de matières certifiées non teintes et sans imprimés toxiques, la collection intitulée “The Unboxing Waltz Tutorial“ proposait une réflexion sur l’idée de la “boîte en carton en tant que récipient protégeant des articles précieux pendant une durée limitée“, jusqu’au moment de leur réception ou de leur déballage. Pour ce créateur formé à Central Saint Martins, membre de la Chambre Syndicale de la Mode Masculine de Paris depuis 2003, cet “unboxing de silhouettes physiques incarne aussi les emballages symboliques dans lesquels nous vivons“.
Au-delà du concept, la présentation proposait des imprimés originaux avec des textures effilochées et des oiseaux exotiques apposés sur des articles en maille, des trenchs oversize ou d’amples costumes à carreaux jaunes et verts. Des looks légers en tissu technique adoptaient des tonalités crème: des bermudas, des manteaux d’été de longueur 3/4 et des imperméables courts avec des fronces aux poignets. Certains looks étaient intégralement noirs, comme une robe semi-transparente portée avec un bomber sportif et un voluptueux chapeau. Les mots “forever“ et “out of deliver“ étaient aussi imprimés ton sur ton sur des robes ou des pulls en maille.
La collection printemps/été intègrera aussi une collaboration avec la designer de joaillerie scandinave Vibe Harsløf, également connue pour son travail avec des marques comme Facetasm, Soulland et Wood Wood. Le prochain défilé de Henrik Vibskov aura lieu le 9 août pendant la Copenhagen Fashion Week.

Le rêve de surfeur d’Arturo Obegero
Fidèle à son ADN, Arturo Obegero s’est à nouveau inspiré de sa terre natale pour présenter sa dernière collection, dépeignant une “fantaisie romantique“ au Palais de Tokyo. Sous le titre “Surfer du soir“, la collection retraçait la naissance de la culture du surf au Pays Basque au début du XXe siècle, créant un vestiaire imaginaire pour des personnalités distinguées sortant de l’eau pour entrer dans la ville. Une idée originale, qui a donné lieu à des silhouettes sophistiquées aux touches romantiques, à mi-chemin entre la pratique du sport d’eau et les sirènes oniriques.
“Tapia de Casariego, ma ville natale de la région des Asturies, garde cette tradition sportive en vie. J’ai grandi en regardant les surfeurs, dont mon frère Pedro, qui a sa propre école de surf“, commente le designer. Son inspiration est en partie venue de l’effet hypnotique des vagues, qu’il a fini par recréer sur des tops drapés et ondoyants, brodés de sequins représentant l’écume marine sur des transparences noires ou même de grands cols asymétriques.
Cet univers onirique s’est traduit en des silhouettes enveloppant les corps et créant des formes abstraites, incarnant la vision unique qu’Arturo Obegero a de l’élégance classique. Des robes noires et des combinaisons ajustées en dentelle réinterprétaient des pièces de plus en plus reconnaissables dans le vestiaire du designer espagnol. Ses chemises décolletées et décontractées, ses pantalons de costumes amples et ses longs gants sophistiqués étaient aussi présents.
Diplômé en 2018 de la prestigieuse école de Central Saint Martins, le créateur installé à Paris a fait ses premiers pas chez Lanvin avant de lancer sa marque éponyme en mars 2020. Depuis, Arturo Obegero présente toutes ses collections à la semaine de la mode masculine de Paris et fait aujourd’hui partie des références de célébrités médiatiques comme le chanteur britannique Harry Styles.
Tous droits de reproduction et de représentation réservés.
© 2023 FashionNetwork.com