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Marguerite Capelle
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5 juil. 2021
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Haute Couture: Paris s’attend à une semaine chargée en débuts, en installations et en célébrations

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Marguerite Capelle
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5 juil. 2021

Les fashionistas prédisent la mort de la haute couture depuis plus de dix ans, mais la nouvelle saison parisienne qui commence la semaine prochaine sera la plus riche en défilés live de toute cette année mode, partout dans le monde.


Chanel - Spring-Summer2021 - Haute Couture - Paris - © PixelFormula


"Comme tout le monde, je suis enchanté de voir réapparaître un nombre substantiel de défilés physiques. Les marques les plus prestigieuses m’épatent toujours par la grande qualité de leurs défilés, jusqu’au moindre détail: la créativité des pièces, le savoir-faire des ateliers, les lieux, les tops et les choix de casting… Mais il y a aussi l’arrivée de nouveaux créateurs, qui cherchent à exprimer leur talent et leurs rêves, et qui n’ont aucune limite: ils explorent de nouveaux territoires en matière de développement durable, d’économie circulaire ou de numérique", déclare Ralph Toledano, président de la Fédération de la Haute Couture et de la Mode. Celle-ci a succédé à la Chambre Syndicale de la Haute Couture, fondée en 1868, et règne toujours sur toutes les défilés de mode à Paris.

La saison officielle commence lundi avec Schiaparelli, maison fondée par la romaine Elsa Schiaparelli et dont l’américain Daniel Roseberry dirige aujourd’hui la création. Même si c’est une autre maison créée par un espagnol, cette fois, Cristobal Balenciaga, qui présentera le défilé assurément le plus attendu de la saison, puisque la griffe revient à la Haute Couture après plus d’un demi-siècle d’interruption.

Balenciaga, dont le créateur d’origine géorgienne Demna Gvalasia a choisi de présenter le come-back à l’adresse historique de la maison, au 10 avenue George V, fait partie des huit marques qui organiseront des défilés en live, devant un véritable public. Parmi les sept autres figure Christian Dior, qui installera un décor géant à l’intérieur du musée Rodin, conçu par un artiste dont on ne connait pas encore le nom, espace qui restera accessible au public pendant plusieurs semaines. La dernière fois que la griffe a proposé ce genre d’installation durable – une œuvre de Judy Chicago – il y a dix-huit mois, plus de 10.000 personnes l’ont visitée.


Christian Dior - Spring-Summer2021 - Haute Couture - Paris - © PixelFormula



Le retour à la Haute Couture de maisons historiques comme Balenciaga, de même que l’arrivée de nouveaux talents, montrent bien à quel point celle-ci compte à Paris, et plus largement, en France. Ralph Toledano identifie trois principales raisons à cela.

"Paris est incontestablement la capitale mondiale de la mode. La Haute Couture est le pilier de la mode française, c'est ce qui fait sa singularité, et c'est une richesse culturelle et un héritage. Pour ces raisons, elle joue un rôle très important dans la mode au sens large. D’abord, parce que c’est le meilleur laboratoire de créativité qui soit, un endroit où les créateurs peuvent exprimer leurs rêves et leurs fantasmes sans aucun filtre. C’est aussi un champ d’exploration pour les nouvelles technologies, en harmonie avec l’intelligence des mains. La Haute Couture irrigue tout le système de la mode", explique le dirigeant.

D’autre part, la couture représente le top de l’excellence en matière de savoir-faire et d’artisanat d’art, pour n’importe quel atelier (des broderies aux plumes, en passant par les chapeaux et les bijoux). Enfin, c’est un support unique pour faire connaître une marque et développer son image. "En résumé, la Haute Couture incarne la singularité et le raffinement, et ce de la plus belle des manières", souligne Ralph Toledano.

Pour le premier jour, est également prévu un défilé live d’Azzaro, avec Olivier Theyskens aux manettes, l’un des grands créateurs modernistes et gothiques de la mode.

Mardi commence avec un double programme Chanel, alors que la créatrice Virginie Viard emmène la maison au Palais Galliera, qui accueille actuellement une remarquable exposition sur Coco Chanel. Et le couronnement de cette journée, ce seront les quatre-vingt-sept ans du maître italien Giorgio Armani, qui présentera sa collection dans ce que beaucoup considèrent comme la plus belle ambassade de Paris, l’Hôtel de Boisgelin, célèbre pour ses trompe l’œil et ses plafonds aux fresques dorées.

De nombreuses marques tenteront de se greffer à la saison, avec des défilés et des événements



En dehors de la Haute Couture à proprement parler, de nombreuses marques tenteront de se greffer à la saison, avec des défilés et des événements. Côté mode, les choses commenceront dimanche après-midi, avec un défilé de prêt-à-porter Off-White dans un lycée parisien, à 17h00. Et aussi les débuts les plus importants de tous: la première collection de Pieter Mulier pour Azzedine Alaïa, présentée dans la maison historique de la griffe, dans le Marais.

Il y aura d’autres débuts importants au programme de la Haute Couture. Jean-Paul Gautier ayant pris sa retraite, la maison a décidé d’inviter un créateur indépendant chaque saison pour imaginer une nouvelle collection couture. Cette idée va se concrétiser mercredi soir, avec une première collection de la grande créatrice japonaise et maîtresse de l’assemblage, Chitose Abe de Sacai, qui sera présentée au siège Gaultier, dans le 3ème arrondissement.

Signe de l’attrait exercé par la Haute Couture dans le monde, les deux derniers couturiers indépendants qui doivent présenter des défilés live ne sont pas français: il s’agit de Zuhair Murad, du Liban, et de Vaishali S, qui vient d’Inde.

En résumé, les quatre journées de défilés atteindront le total impressionnant de 33 marques représentées, pour la plupart grâce à des événements filmés, tandis que plus de la moitié proposent des présentations sur rendez-vous privé. On s’attend aussi à ce que Charles de Vilmorin soit au cœur de l’attention: le jeune prodige français à mèche, sosie de Yves Saint Laurent, présentera une vidéo de Haute Couture mercredi soir.

Depuis un quart de siècle, la Fédération soutient et encourage activement l’entrée de nouveaux noms dans le calendrier de la Haute Couture. L’émergence d’une nouvelle génération de clientes y contribue aussi, souligne Ralph Toledano, qui attire l’attention sur l’influence de la géopolitique: des politiques économiques plus libérales, la chute du Mur de Berlin et bien sûr l’incroyable croissance de la zone Asie-Pacifique – et tout particulièrement celle de la Chine.

Déjà, en 1996, la Fédération avait créé une nouvelle catégorie pour les maisons basées hors de France qui créent de la Haute Couture ailleurs, mais veulent défiler à Paris: celle de "membre correspondant". Une deuxième catégorie, celle de "participant invité", a vu le jour en 1997. Mais tous les postulants doivent d’abord être soumis à un processus d’approbation rigoureux, devant un comité de la Haute Couture: l’équivalent mode des Fourches Caudines pour beaucoup de jeunes espoirs.

Les plus importants rédacteurs en chef de la presse mode internationale sont confirmés



Le département des marques émergentes de la Fédération aide depuis longtemps les jeunes talents grâce à une formation complète en management dispensée par l’Institut Français de la Mode. Et pendant la pandémie, la Fédération a créé un fonds spécial dédié à la mode, pour aider financièrement ces marques émergentes.

En raison des règles sanitaires strictes, très peu de rédacteurs de mode et d’acheteurs sont attendus du Royaume-Uni. Néanmoins, les attachés de presse côté français ont aussi révélé à FashionNetwork.com avoir reçu des demandes de la plupart des principaux journalistes new-yorkais, y compris Anna Wintour, Vanessa Friedman du New York Times, ou Samira Nasr, qui a été nommée rédactrice en chef de l’édition américaine de Harper’s Bazaar en juin dernier, au pire moment de la pandémie.

Les rédacteurs en chef de Harper’s Russie et Allemagne, Dasha Veledeeva et Kirsten Schneider, sont également attendus.

Par ailleurs, il paraît que le petit millier de femmes de milliardaires et autres princesses du Golfe qui peut réellement s’offrir ces vêtements sera aussi du voyage, grâce aux jets privés. Outre leurs emplettes couture, elles pourront peut-être se faire inviter à la soirée parfumerie Louis Vuitton, qui aura à nouveau lieu dans la fondation artistique de la maison, au Bois de Boulogne ce lundi, ou encore assister au lancement d’un nouveau magazine de mode indépendant créé par des fashionistas français pleins d’énergie, la Revue du Vertbois.

Cela dit, la Fédération a aussi radicalement restructuré sa plateforme, de façon à pouvoir diffuser en live tous les défilés parisiens de Haute Couture, et les rendre accessible au public partout dans le monde. Des partenariats mondiaux avec Canal+, YouTube ou encore Tencent permettront d’amplifier encore cette diffusion. En un mot, le savoir-faire et la créativité de la Haute Couture n’ont jamais été aussi visibles. Pas étonnant que Paris soit si attachée à cette tradition rare et unique.

"L’omniprésence du numérique suscite aussi le besoin de revenir à ce métier ancien. Plus on vit dans un monde virtuel, plus la Haute Couture (de même que l’art et les métiers d’art de façon générale) attire les gens comme un aimant", remarque Ralph Toledano.
 

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