Isabel Marant : un rachat synonyme d’un changement de dimension ?

Auteur :

Anaïs Lerévérend

Publié le
24 juin 2016

La possibilité de voir la griffe Isabel Marant perdre son indépendance en accueillant un fonds à son capital n’est plus réellement une surprise. Largement courtisée, la marque a déjà entamé des négociations par le passé, avec Eurazeo l’an dernier notamment, mais sans jamais accéder au niveau d’avancement actuel. La créatrice et ses associées, Sophie Duruflé et Nathalie Chemouny, sont en effet entrées en négociations exclusives avec le fonds français Montefiore, qui s'appuierait sur un autre fonds, selon nos informations.

 
Une prise de participation qui, si elle aboutit, sera majoritaire à 51 %. La fin d’une époque pour une maison qui pouvait s’enorgueillir d’être restée indépendante depuis son lancement en 1994 et qui, surtout, a réussi, fait rare, à piloter seule son internationalisation. L’export représente en effet 80 % des ventes de la marque aujourd’hui, avec des focus très forts aux Etats-Unis, en direct, et en Asie, en partenariat. Le chiffre d’affaires est aujourd’hui estimé à 150 millions d’euros, voire même 200 millions pour les plus optimistes, après avoir été chiffré à 70 millions en 2011.
 
Une forte croissance qui a été portée par des ouvertures de boutiques, vingt dans le monde à ce jour, mais aussi par le réseau wholesale sélectif (environ 600 points de vente). Il manquait étonnamment un canal direct à la griffe, son propre e-shop, mais la perspective de la naissance prochaine de celui-ci en 2017 grâce à Yoox a pu séduire les investisseurs.

Publicités

Car il existe bel et bien un fort potentiel pour Isabel Marant, notamment pour développer un plus grand nombre de boutiques à l’enseigne, et ce grâce à sa popularité. La notoriété de la marque est grande, encore boostée par une collaboration H&M très demandée en 2013, et l’image en est précise auprès du public : la dégaine « effortless chic », mariant bohème, rock et touche parisienne est aujourd’hui un incontournable qui en a inspiré beaucoup.
 
La créatrice n’a jamais quitté son crédo style, avec une approche commerciale rassurante pour les investisseurs, mais elle est montée en gamme. S’il existe toujours une partie de ses collections aux prix du « luxe abordable » avec sa ligne bis Etoile, sa collection principale relève désormais davantage du luxe plus vraiment abordable. Des prix et des points de vente clairement identifiés créateurs, accompagnant des campagnes et défilés qui la positionnent définitivement plus haut sur l’échiquier mode qu’à ses débuts.  
 
Un réseau de boutiques à développer, une ligne maroquinerie à affirmer, une notoriété internationale, des prix permettant des marges confortables, ce sont bien des atouts pour les fonds candidats. La problématique sera désormais pour la griffe de parvenir à rester « incarnée » par sa créatrice, tout en accélérant son développement, autrement dit, parvenir à maintenir sa désirabilité tout en dopant sa présence à travers le monde.