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13 févr. 2014
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Les paradis fiscaux attirent toujours les entreprises, en dépit des tentatives de régulation

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13 févr. 2014

PARIS, 13 fév 2014 (AFP) - Malgré la guerre lancée en 2009 par le G20, les paradis fiscaux gardent la cote auprès de certains des fleurons de l'économie française, qui y implantent des filiales dans une grande opacité. L'OCDE s'est décidée à partir en croisade contre l'évasion fiscale. Selon une étude publiée jeudi par la revue Projet, près d'un quart des filiales étrangères des groupes du CAC 40 sont installées dans des paradis fiscaux, soit au total 1 548 sociétés.

Photo : AFP.

"La présence dans les paradis fiscaux n'a pas diminué depuis la première étude publiée par Alternatives Économiques, en 2009", rapporte cette enquête réalisée par le collectif d'ONG Plateforme paradis fiscaux et judiciaires. Ce chiffre est même sous-estimé puisque 23 sociétés du CAC 40 ne publient pas la liste complète des entités qu'elles consolident dans leurs comptes, mais uniquement leurs "filiales principales". Trois d'entre elles ne donnent même pas l'information nécessaire pour leur localisation.

A la tête du classement, on trouve BNP Paribas, avec 214 filiales offshore. La banque française, qui n'a pas souhaité réagir, était déjà première de la liste établie en 2009 et dans les inventaires de l'ONG CCFD-Terre Solidaire publiés en 2010 et 2012.

Elle est toutefois talonnée de près par le géant du luxe LVMH, qui en totalise 202, dont 60 dans la liste noire des paradis fiscaux élaborée par l'OCDE. Il est même en tête des grands groupes européens sur cet aspect. En outre, parmi les géants français pointés du doigt par les ONG figurent plusieurs groupes dans lesquels l'État détient une participation. Ainsi, Airbus, GDF Suez ou encore France Télécom ne révèlent pas publiquement toutes leurs filiales.

L'étude admet cependant que cet inventaire ne suffit pas à "mesurer le degré de civisme fiscal des entreprises multinationales". En effet, l'implantation d'une filiale dans un paradis fiscal peut être justifiée par la présence d'un marché et d'une activité réelle.

"La présence de filiales dans les paradis fiscaux n'est pas problématique en soi. Le problème, c'est l'opacité qui entoure ces filiales. Si les entreprises n'ont rien à cacher, elles devraient être en mesure de publier leurs résultats et bénéfices détaillés pays par pays", a expliqué à l'AFP Jean Merckaert, qui a piloté l'étude. Face à ce manque de transparence, l'OCDE est bien décidée à "réellement changer les règles du jeu" en s'attaquant à l'évasion et la fraude fiscale, selon son secrétaire général Angel Gurria.

L'organisation a présenté jeudi sa norme d'échange automatique de données fiscales inspirée de ce qui ce fait déjà outre-Manche, qu'elle espère voir adopter par le plus grand nombre de pays sur la base du volontariat. Ce système, qui entre dans le cadre de l'échange automatique de renseignements que le G20 s'est engagé à mettre en place d'ici fin 2015, ne concerne toutefois que les particuliers.

Son volet entreprises, qui repose sur l'idée de détailler pays par pays les effectifs et résultats des sociétés, n'en est pour le moment qu'à un stade préliminaire.

La fraude fiscale est toutefois depuis plusieurs mois au coeur du débat public en France, ravivé par les accusations d'évasion fiscale portées contre les géants américains Google et McDonald's, poussant les pouvoirs publics à agir.

Ainsi, à partir du 1er janvier 2015, les banques françaises auront l'obligation d'expliquer en détail leur présence dans chaque pays, et donc dans chaque paradis fiscal. Une règle dont sont pour l'heure épargnés les autres secteurs puisque la France conditionne son application à une décision similaire au niveau européen. Ce que refuse l'Allemagne et le Royaume-Uni.

En 2009, la France avait élaboré une liste des États et territoires non coopératifs en matière fiscale. Les Bermudes et Jersey, en ont été exclus rapidement, au grand étonnement des ONG.

"Il y a une prise de conscience de l'ampleur du phénomène, mais malgré les effets de manche, la réponse politique reste extrêmement timorée", a déploré Jean Merckaert.

"Les initiatives récentes vont dans le bon sens, mais l'opacité orchestrée par les paradis fiscaux est encore omniprésente. Il faut des contreparties aux faveurs accordées aux entreprises, et l'une de ces contreparties, c'est la transparence", a-t-il conclu.

Par Maxime POPOV

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