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Les salariés de la maison Lacroix entre incrédulité et colère

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1 déc. 2009

PARIS, 1 déc 2009 (AFP) - "On n'arrive pas à croire qu'on arrête": les salariés de la maison de couture Lacroix ont accueilli mardi 1er décembre avec incrédulité, émotion et parfois colère la décision du tribunal de commerce de Paris avalisant le plan qui prévoit le licenciement de 90% d'entre eux.

Le plan de redressement du groupe américain Falic, l'actuel propriétaire, prévoit la suppression d'une centaine de postes. Une douzaine de salariés seulement devraient rester en activité pour gérer des contrats de licences.

Plusieurs dizaines d'entre eux étaient présents à l'audience, dont une partie de la petite trentaine de couturières. Plusieurs avaient les larmes aux yeux après l'annonce de la décision. Beaucoup ont gardé le silence.

"C'est surréaliste, on n'arrive pas à croire qu'on arrête, ce n'est pas possible", lance Monika Soszynska, assistante accessoires haute couture. "Je ne peux pas croire qu'on ne fera pas la prochaine collection haute couture" en janvier.

Toutes ont voulu y croire jusqu'au bout et ont continué depuis juillet à venir sur leur lieu de travail, alors que les ateliers sont en sommeil depuis la présentation de la collection haute couture.

"Je me suis battue, j'y ai cru à fond", surtout à l'hypothèse du rachat par un cheikh émirati, "et j'y crois encore", lance Nadia Schooppe, 47 ans, qui a travaillé 27 ans et demi auprès de Christian Lacroix, chez Patou puis dans sa propre maison de couture. "Je ne pensais pas que ça se terminerait comme ça. Je ne comprends pas comment une maison comme Christian Lacroix peut ne pas fédérer des acheteurs, et mon avenir sans Christian Lacroix, je ne le comprends pas non plus", dit-elle.

"On ne s'est pas projetées dans l'avenir, on n'a toujours fait qu'espérer", dit une autre couturière qui a aussi du mal à tourner la page. "C'est la lettre (ndlr: de licenciement) qui permettra de se projeter", dit-elle.

"On espérait toutes jusqu'au bout, on va attendre les lettres" qui devraient arriver d'ici à quinze jours, confirme Véronique Anton, 37 ans dont 19 à l'atelier flou de la maison Lacroix.

Chez certains, la colère se mêle à l'incrédulité. "On est en colère quand on voit le travail de M. Lacroix, tout ce qu'il a fait", dit Monika Soszynska. "Un patrimoine français à un tel niveau ne peut pas disparaître comme ça", ajoute-t-elle, émue.

"Les clientes sont là, on a un soutien énorme, et tout ça est gâché", déplore un autre salarié présent à l'audience. Les Falic "n'ont pas su faire et ne sauront pas faire, ils vont vendre des kleenex et des briquets", lance-t-il.

L'avenir s'annonce sombre. Les couturières "vont avoir du mal à se réintégrer. Le savoir-faire qu'elles ont acquis au sein de la maison Lacroix n'est pas transposable ailleurs", estime un salarié. "Un commercial, un contrôleur de gestion arrivera toujours à se replacer ailleurs, mais une fille qui a travaillé 22 ans chez Christian Lacroix, qui a commencé à 17 ans, elle n'ira pas bosser chez Chanel, elle ne saura pas".

"Retrouver un emploi, c'est pas demain la veille", reconnaît Nadia Schoope. "On sait qu'ailleurs il n'y a pas de boulot". Elle espère "trouver un peu de travail pendant les collections", les maisons embauchant alors des extras, et envisage de "se reformer en prêt-à-porter de luxe".

Le monde de la couture "est un monde très fermé", rappelle une autre couturière, qui n'exclut pas de se présenter à une agence d'intérim. Elle n'a aucune piste pour l'instant.

Par Dominique SCHROEDER

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