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10 févr. 2021
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6 minutes
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Liliane Jossua (Montaigne Market): "On se bat contre des moulins à vent"

Publié le
10 févr. 2021

Active dans la mode depuis plus d’un quart de siècle, Liliane Jossua dresse pour FashionNetwork.com le bilan de ces quinze dernières années passées à la tête du célèbre multimarque de luxe Montaigne Market, qui baissera définitivement  rideau le 24 février. L’occasion pour la détaillante, qui planche sur un nouveau projet top secret, de revenir sur les raisons qui l’ont poussée à fermer sa boutique parisienne, tout en posant son oeil expert sur le marché de la mode post-2020.


Liliane Jossua - DR

 
FashionNetwork.com: Vous avez annoncé fin janvier la fermeture de votre boutique Montaigne Market. Comment se sont passés ces derniers jours de ventes ?
 
Liliane Jossua : Cela a été dix jours intenses. Il y avait la queue devant la boutique! Je ne pensais pas qu’il y aurait autant de monde car les gens, on ne les voit plus depuis longtemps. Cela était inespéré et va nous aider à rembourser quasiment toutes nos dettes, surtout envers nos fournisseurs. Beaucoup de clients sont venus pour nous soutenir, ils pleuraient dans la boutique. Nous avons vécu des moments très émouvants. J’ai reçu aussi des messages de bienveillance de toutes parts. Une vraie déferlante, entre clients, fournisseurs, institutions. Pour moi et mon équipe, cela a été un gros choc émotionnel. C’est triste, car à Paris, à part l’Eclaireur, beaucoup d’enseignes ont disparu.

FNW : Que va devenir votre équipe?

LJ :
Les quinze personnes qui travaillent avec moi, dont certaines depuis l’ouverture de Montaigne Market en 2005, vont se retrouver au chômage. Une équipe remarquable, qui est restée engagée jusqu’au bout. En fait, on formait une petite famille. Humainement, c’est très dur. Un déchirement. Pour nous tous, c’est un changement de vie radical. C’est pourquoi, pour éviter une coupure nette, alors que nous devions fermer le 5 février, nous allons rester ouverts jusqu’au 24, sur rendez-vous. Certaines clientes n’ont pas pu venir ces derniers jours, et puis il nous reste encore quelques modèles d’archives.
 
FNW : A l’occasion de votre braderie finale, vous avez mis en vente 300 pièces d’archives. Il s’agissait de votre collection personnelle?
 
LJ :
J’avais gardé des pièces de tous les créateurs que j’ai côtoyés au cours de ces seize ans. De Christophe Decarnin pour Balmain à Hedi Slimane pour Saint Laurent en passant par Alber Elbaz pour Lanvin, Riccardo Tisci pour Givenchy ou encore les modèles des toutes premières collections d’Anthony Vaccarello ou de Marc Jacobs. En les ressortant, c’est toute notre histoire qui a ressurgi et une kyrielle de souvenirs.
 
FNW : Qu’est-ce qui vous a amenée à fermer? Quelle a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase?

LJ :
Aujourd'hui, je ne peux plus exercer mon métier avec passion, comme je l’ai fait jusqu’à présent. Cela a commencé à être compliqué avec les Gilets jaunes et les grèves, mais jusqu’ici nous nous en étions toujours sortis. Puis il y a eu la pandémie et le confinement. Nous avons passé six mois à nous réinventer et mettre sur pied des projets, que nous devions systématiquement annuler ou réadapter en fonction des annonces du gouvernement. Malgré tout, jusqu’en décembre, nous tenions encore. Mais là, avec les variants du virus, le couvre-feu et les nouvelles restrictions sanitaires, on ne peut plus travailler. Avec la Fashion Week de Paris fin janvier, qui s’est tenue à nouveau en mode virtuel, j’ai compris que nous allions perdre notre identité.
 
FNW : C’est-à-dire?

LJ :
Nous sommes connus pour le large panel que nous proposons, entre maisons institutionnelles et petites marques internationales. J’ai construit cette identité en vingt-cinq ans de métier, en allant dénicher des petits labels et de nouveaux créateurs. Nous étions l’un des rares multimarques à proposer 300 marques. Avec la crise, j’ai été obligée d’en couper 250. En fait, c’est le chat qui se mord la queue. Quel intérêt d’acheter si les clients ne viennent pas? D’un autre côté, si je ne peux plus acheter comme j’en avais l’habitude, je perds mon identité. Quant à l’e-shop, nous n’avons pas les moyens de le gérer comme font les grands groupes.
 

Clap de fin le 24 février pour Montaigne Market - DR


FNW : Comment avez-vous vu évoluer les consommateurs ces derniers mois?

LJ :
Depuis le Covid-19, les clients ne répondent plus. Nous avons passé six mois à avoir des commandes pour des pièces spéciales et importantes, qui ont toutes été décommandées en raison de la pandémie de la part de nos clientes internationales au Brésil, aux Etats-Unis, mais aussi au Portugal ou à Paris. Près de 70% de notre clientèle est étrangère. L’arrêt des flux touristiques n’a fait qu’accélérer un mouvement déjà en marche. La façon de consommer a totalement changé depuis quatre ans. Avec les attentats, les étrangers ont arrêté de venir. Or ce sont eux qui faisaient les achats les plus spéciaux, surtout pendant les Fashion Weeks, où nous réalisions l'essentiel de notre chiffre d’affaires.
 
FNW : Qu’en est-il de la clientèle locale?

LJ :
A Paris, cela fait longtemps que l’on ne s’habille plus. Cela a repris un peu à la rentrée, mais là on se bat contre des moulins à vent. A partir du moment où les restaurants restent fermés et qu’il n’y a plus de soirées, il nous est impossible de vendre. Il n’y a plus de raison de s’habiller et il n’y a plus d’acheteurs. Dans la rue ou chez eux, les gens sont en jogging, ils veulent juste être confortables. De notre côté, en termes d'achats, si l'on ne prend pas de risques, on ne peut pas évoluer. Or là, nous sommes bloqués. C’est très déstabilisant et frustrant.
 
FNW : Combien vous a coûté cette crise?

LJ :
Notre chiffre d’affaires a chuté de 80% en 2020. Certes, nous avons pu bénéficier du dispositif du chômage partiel, mais au final, nous n’avons pas été beaucoup aidés. Nous avons obtenu un PGE, mais il faut tout rembourser, sans compter les charges et les loyers à payer. Il est clair qu’à l’emplacement où je suis, avenue Matignon, je ne peux pas tenir. A Saint-Barth, où se trouve la première boutique que j’ai ouverte en 1996, ce n’est pas comparable. Là-bas, les autorités ont su préserver la population, l’économie et le commerce. Tout fonctionne.
 
FNW : Qu’est-ce que l’année 2020 a mis en évidence?

LJ :
Nous sommes rentrés dans un nouveau monde. 2020 a marqué profondément les esprits et changé les mentalités. Désormais, les personnes vont à l’essentiel. En rangeant leur placard pendant le confinement, les consommateurs ont découvert des trésors. Ils ont compris qu’ils n’avaient pas besoin de les remplir ultérieurement. En revanche, ce qui nous manque le plus, c’est la convivialité, ce sont les rapports humains. Il y a eu des remises en question profondes qui ont ramené les gens vers des valeurs essentielles. Cela s’est traduit à travers les achats. On achète des livres et des bijoux, plus que des vêtements.
 
FNW : Quels sont vos projets à présent?
LJ :
Nous avons la chance d’avoir la boutique de Saint-Barth, qui va continuer à porter notre nom. Et puis nous sommes en train de plancher sur un grand projet totalement nouveau, qui n’existe pas dans le monde. Mais je ne peux pas en dire davantage. Ce n’est pas fini. C’est juste une page qui se tourne.

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