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New York bataille pour garder son quartier de la confection

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10 févr. 2007

NEW YORK, 10 fév 2007 (AFP) - Juste derrière les néons de Times Square, s'active un univers qui tant bien que mal tente de se maintenir : le quartier de la confection, tout dernier bastion industriel de Manhattan et coeur de la mode américaine.


Photo : Bryan Bedder/AFP

Dans les rues encombrées de camions de messagerie, les merceries, marchands de tissus, spécialistes du ruban ou du bouton se succèdent, au pied de massifs bâtiments de brique où s'affairent ateliers de création et salons d'exposition. A deux pas, la semaine des défilés vient de s'achever.

Alors que les délocalisations ont en partie vidé le "Garment district", 3 500 entreprises continuent à le faire vivre et à faire exister une nuée de métiers.

L'une d'elles, implantée là depuis 1955, vient même d'initier le mouvement inverse : rapatrier sa production à New York, après avoir pourtant été une des premières à s'installer en Asie. Elle aimerait donner le la.

"Nous voulons revenir à New York. On peut obtenir les produits en dix jours, en Chine ça prendrait des mois !", dit le PDG de Victoria Royal, Alan Sealove, depuis le siège de sa société. "Nous vendons beaucoup à des catalogues. S'ils demandent cinq cents exemplaires supplémentaires d'une robe, on peut répondre. Même si ce sera un petit peu plus cher. Nous avons estimé que beaucoup de produits pouvaient être faits à New York."

La décision concerne pour l'instant 20 % de sa marque "Mary Bays" : les pièces simples nécessitant le moins de main d'oeuvre, qui seront donc faites au coin de la rue.

Mais M. Sealove montre aussi une longue robe de tulle noir brodé de perles : "Ce genre de modèle ne peut plus être fait ici", dit l'entrepreneur, qui fait fabriquer en majorité en Chine.

Quand le quartier fut conçu, entièrement pour la confection, dans les années 20, il comptait 500 000 machines à coudre (et autant d'emplois). Après trente ans d'hémorragie du travail, la mode y fait vivre aujourd'hui 25 000 personnes (68 000 sur l'ensemble de New York).

Depuis 2001, sous le coup de la compétition asiatique et de la pression immobilière sur Manhattan, la mode représente moins de 50 % des activités du quartier. Aujourd'hui ce secteur est même tombé à 46 %, avec la confection mais surtout la création et les showrooms. Calvin Klein, Ralph Lauren, Donna Karan, Oscar de la Renta, Liz Claiborne... sept des dix plus grands noms sont là.

Pour Alice Ritter, jeune créatrice, le "Garment district" est irremplaçable : "Tout le monde est ici, patronniers, fournisseurs de tissu, passementiers. Tant que j'ai une petite activité, je ne peux travailler avec la Chine, ce n'est pas intéressant, c'est compliqué, il y a déperdition d'information, et puis je ne les intéresse pas!"

"On a tant annoncé la fin du Garment District, mais les gens sont encore ici et travaillent !", poursuit-elle, citant le projet d'un jeune modéliste d'ouvrir un atelier de confection de grand luxe.


Présentation d'un modèle du créateur Marc Jacobs lors d'un défilé à New York, le 6 février 2007 - Photo : Stan Honda/AFP

Les finitions ou les opérations haut de gamme, qui nécessitent un suivi rigoureux sont aussi demandeuses de fabrication locale. C'est le cas de Donna Karan, Marc Jacobs, Nanette Lepore...

Le Centre de soutien économique du Garment District (BID) mise sur le succès des créateurs américains, à l'export notamment : "La force de l'Amérique est l'invention du sportswear : le monde entier porte du sportswear".

"L'industrie de masse est finie, mais on aura toujours besoin de produire en partie ici", dit Gerald Scupp, co-directeur du BID. "Après des années sous le choc, où les gens ne savaient plus quoi faire, ils ont appris à s'adapter. Prenez les sociétés d'impression du tissu, on pourrait les croire obsolètes, mais il y en a toujours".

Alan Sealove attend les résultats de sa première saison "made in USA". "Il reste à voir à quel point c'est profitable", dit-il, avant d'ajouter, comme encore stupéfait : "Imaginez qu'il y a quelques années, les portants d'habits empêchaient les gens de circuler sur les trottoirs."

Par Catherine HOURS

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