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13 avr. 2021
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Ouïghours: sur quoi repose la plainte déposée contre Inditex, Uniqlo, SMCP et Skechers?

Publié le
13 avr. 2021

Plainte a été déposée en France contre Inditex, Uniqlo, SMCP et Skechers pour leurs liens avec les accusations de travail forcé des Ouïghours. Selon l'ONG Sherpa, d'autres plaintes européennes devraient prochainement être annoncées, visant d'autres marques, et sur d'autres bases légales. Mais sur quelle base repose la plainte française? Une conférence de presse a permis ce 12 avril d'en identifier les ressorts et objectifs.


Des manifestants protestant contre le traitement infligé aux Ouïghours à Bruxelles en février 2019 - Shutterstock


Pour le collectif Ethique sur l'Etiquette, cette démarche est simplement l'étape suivante après la constitution de la coalition End Uyghur Forced Labour, qui rassemble 300 organisations de droit international. "Celle-ci mène un travail de pression systématique sur ces enseignes, en dénonçant les complicités et en les appelant se désengager. Mais malgré ceci, seules deux enseignes d'envergure ont répondu aux demandes: Marks & Spencer et Asos. Cette plainte, inédite, est dont une étape supplémentaire pour mettre fin à l'impunité de ces sociétés transnationales."

La plainte pour "recel de travail forcé" et "recel de crimes contre l'humanité" est effectivement unique dans sa forme. Posant la question du fondement légal de la démarche. "Si ce n'était pas le cas, on ne serait pas là", répond simplement l'avocat William Bourdon. Il explique: "Sur le travail forcé, nous estimons que l'évolution du droit et de la jurisprudence doivent amener le procureur à ouvrir une enquête préliminaire, dès lors par exemple que la cour de cassation a estimé que le recel de travail clandestin pouvait être poursuivi en droit français. L'accusation de recel de crimes de génocide et crimes contre l'humanité, pour être transparent, ne fait pas l'objet d'un consensus juridique en France. Mais nous pensons que l'évolution du droit multilatéral pénal dans le concert des nations doit conduire le parquet à innover face à ces crimes d'inhumanité."

L'objectif de la plainte est donc d'obtenir de la justice française une enquête sur les liens entre les marques visées et des fournisseurs situés dans la région chinoise du Xinjiang. Il s'agira pour les enquêteurs d'identifier les sous-traitants des marques, puis d'établir l'implication de ceux-ci dans la politique menée par Pékin concernant la minorité musulmane ouïghoure.

"Certains éléments factuels montrent que les entreprises ne pouvaient ignorer à quoi participaient leurs sous-traitants", explique l'avocat Basile Oudet, du cabinet Bourdon & Associés. Pour qui les marques devront soit prouver avoir coupé les ponts avec les entreprises accusées de travail forcé, soit prouver qu'elles ont vérifié que leurs sous-traitants n'étaient pas impliqués.

Mais comment enquêter en Chine? "Il y a absolument zéro chance qu'une commission rogatoire délivrée par un juge français puisse permettre une enquête en Chine", confirme William Bourdon, pour qui cela ne freinera cependant pas l'enquête. "Il y a plein d'affaires judiciaires qui le démontrent. Il y aura beaucoup de grain à moudre, de documents, de documentation éthique, de mails… Et il y a aussi toutes les communications faites par les marques. Et, surtout, des témoignages individuels venant de la diaspora ouïghoure qui viendront structurer dans les mois à venir la plainte."

Au cœur de la démarche réside la notion de "présomption de responsabilité". Pour les avocats derrière la plainte, le droit français moderne criminalise déjà un certain nombre d'infractions en imprimant une présomption de responsabilité. Pour William Bourdon, celle-ci devient même aujourd'hui la réplique et la riposte "naturelle", "de bon sens", face aux engagements éthiques et codes de bonne conduite.

"Cette riposte s'impose à partir du moment où les consommateurs du monde entier ont compris que les engagements RSE des marques étaient fait surtout pour se protéger du droit du juge", souligne l'avocat. "C'est cette logique cynique qui est sanctionnée par la présomption de responsabilité."

Les marques répondent



"Nous avons pris connaissance par voie de presse de la plainte déposée par un groupe d’ONG en France, mais nous n’avons pas reçu, ni vu de copie de la plainte. Dans ce contexte, nous ne sommes pas en mesure de commenter son contenu", indique à FashionNetwork.com le groupe Fast Retailing, quatrième acteur mondial de la distribution d'habillement et propriétaire d'Uniqlo. "Si la plainte est fondée sur le rapport publié en 2020 par l’Institut australien de politique stratégique (ASPI), qui relie Uniqlo à deux usines de la région du Xinjiang, nous avions confirmé à ce moment, ne pas avoir de relations d’affaires avec ces usines, ce qui est toujours le cas aujourd’hui."
 

Shutterstock


"En tant qu’entreprise internationale, Uniqlo s’engage à protéger les droits humains des personnes faisant partie de nos chaînes d’approvisionnement", indique par ailleurs le groupe japonais. "Nous continuons à proposer des produits que les clients peuvent acheter avec confiance. Comme nous l’avons confirmé dans le passé, aucun de nos partenaires de production n’est situé dans la région du Xinjiang et aucune usine de tissu ou de filage ne se trouve dans cette région. Le coton utilisé dans notre production est issu de sources durables et d’une production éthique. Par conséquent, cette production exige que les droits de l’Homme soient respectés."
 
Prudent, le groupe ajoute: "Dans le cas où nous découvririons des preuves de travail forcé ou de toute autre violation grave des droits de l’Homme chez l’un de nos fournisseurs, nous cesserons toute activité avec ce dernier."
 
Le géant espagnol de la fast-fashion Inditex (Zara, Pull&Bear, Massimo Dutti, Bershka, Oysho…) indique qu'il considère que l'accusation portée à son encontre est totalement infondée. "Inditex respecte scrupuleusement l'ensemble des législations et recommandations existantes en matière de défense des droits des travailleurs et a mis en place un cadre de conformité aux droits de l'homme à partir des normes internationales les plus élevées", répond le groupe.

De son côté SMCP (Sandro, Maje, Claudie Pierlot et De Fursac) explique qu'il "travaille avec des fournisseurs situés partout dans le monde et précise ne pas avoir de fournisseurs directs dans les régions mentionnées dans le communiqué de presse relatif à la plainte". Le groupe français, qui souligne que n"la chaîne d’approvisionnement du groupe SMCP est totalement indépendante de celle de son actionnaire majoritaire Shandong Ruyi" souligne être signataire du Global Compact des Nations Unies et, en tant que tel souligne avoir des exigences en matière de droits de l'Homme auprès de ses fournisseurs. "Ce Code est consultable sur son site internet. En signant les conditions générales d’achat et son Code de conduite fournisseurs, les fournisseurs du groupe s’engagent à respecter, et à faire respecter par leurs sous-traitants, l’ensemble des clauses de ces documents, souligne l'entreprise. SMCP conduit régulièrement des audits par l’intermédiaire d’un tiers expert et indépendant pour s’en assurer".

Skechers, qui n'a pas formulé de communication spécifique suite à la plainte française, avait spécifié avoir mené des audits auprès d'un de ses fournisseurs, Lu Zhou Shoes, mentionné par l'enquête de l'Aspi de 2020. Ces audits n'auraient pas, selon le groupe américain, apporté d'éléments relevant d'un défaut de conduite de son partenaire de production.

Les entreprises de mode doivent actuellement se montrer très habile dans leur communication sur ce sujet. En effet, les marques s'exprimant sur le sujet des Ouïghours font depuis quelques semaines l'objet d'appels au boycott sur les réseaux sociaux chinois, tandis que leurs produits disparaissent des grandes plateformes locales de vente comme Taobao (Alibaba).

En réponse, les ONG notent que certaines marques sont "revenues" sur leurs engagements concernant le travail forcé en retirant des communiqués de presse ou en modifiant leurs positions, et donnent en exemple Inditex, qui, pris un temps pour cible sur les réseaux sociaux chinois, ne mentionne désormais plus spécifiquement le Xinjiang dans ses principes de "tolérance zéro" figurant sur son site.

D'autres marques bientôt visées



"D'autres organisations situées dans l'Union européenne vont déposer des plaintes en Europe très prochainement. Il y aura d'autres entreprises visées, avec sans doute des éléments différents", fait de son côté savoir Franceline Lepany, présidente de l'ONG Sherpa, qui avait déjà uni ses forces avec Ethique sur l'Etiquette suite au drame du Rana Plazza en 2013, à Dacca, la capitale du Bangladesh.

Pour la responsable, la plainte française s'inscrit pour l'heure dans la lutte pour le respect de devoir de vigilance. "Il y actuellement un certain nombre de procès contre des entreprises pour qu'elles respectent leurs devoirs et plans de vigilance. Ces poursuites vont permettre de remettre les entreprises face à leurs obligations. Et il n'y a pas là que des obligations formelles, il y a aussi un problème de responsabilité."


Des travailleurs ouïghours au Xinjiang en avril 2019 - Shutterstock


Venu défendre la plainte, l'eurodéputé Raphaël Glucksmann voit également dans la plainte un questionnement de société. " Il y a une interrogation qui s’incarne dans cette plainte, et qui est fondamentale pour les Ouïghours, mais aussi pour nous: veut-ton un monde où l’on peut sans le savoir se retrouver embarqué dans le système concentrationnaire chinois, ou bien un monde où mes entreprises doivent veiller à l'origine de leurs produits? "

Les Etats-Unis ont banni les importations de coton produit au Xinjiang, ou de produits fabriqués à partir de celui-ci. L'Union européenne s'est quant à elle contentée de sanctionner quelques décideurs locaux du Xinjiang. Une asymétrie entre les deux grands marchés occidentaux qui agace particulièrement les défenseurs des droits de l'homme.

"Quand les Etats-Unis décident de mener une politique, quels que soient les intérêts qui sont derrière ou l'impact sur des multinationales américaines, ils n'hésitent pas à le faire. En Europe, on a une incapacité à agir quand les intérêts commerciaux sont trop grands", confirme Raphaël Glucksmann, lui-même ciblé par des sanctions chinoises. "Quand l'UE débat pour sanctionner des individus, cela fait consensus. Quand on parle de boycotter le produit de l'esclavage, il y a une discussion beaucoup plus forte. Cela devrait nous interroger".
 

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