Fung Brands est désormais officiellement actionnaire majoritaire de Sonia Rykiel. Alors que l'annonce de la reprise imminente de 80% des parts de la maison avait été rendue publique à la fin du mois de janvier, les acteurs ont aujourd'hui confirmé ce qu'ils appellent "une alliance". Conservant 20% des parts de la société, la famille Rykiel toujours représentée par Nathalie Rykiel, fille de la fondatrice, reste, selon ses mots "un actionnaire important, mais surtout très actif". Celle qui était jusqu'alors présidente de Sonia Rykiel devient désormais vice-présidente du conseil d'administration, tandis que Jean-Marc Loubier, président du fonds Fung Brands, prend la tête de celui-ci.

Nathalie et Sonia Rykiel.

Interrogée par FashionMag.com, Nathalie Rykiel s'est dite guidée dans cette décision par "son ambition pour la maison. Je l'ai emmenée aussi loin que je pouvais toute seule, a-t-elle déclaré. Aujourd'hui, pour continuer de faire grandir une marque avec un ADN et une image aussi forte, il nous fallait un soutien stratégique et donc un actionnaire puissant". La force de frappe de Fung Brands est en effet au rendez-vous, car ses propriétaires, la famille Fung, aussi actionnaire majoritaire du grand groupe Li & Fung, ont montré leurs ambitions précédemment avec la reprise de Robert Clergerie, du maroquinier Delvaux ou encore de Cerruti ces dernières années.

Le fonds piloté par Jean-Marc Loubier (ex-Louis Vuitton, Céline, Escada) souhaite positionner Sonia Rykiel comme une marque globale, encore plus internationale (aujourd'hui l'export représente 50% du chiffre d'affaires), prête à concurrencer de plus grandes griffes. "Cette histoire de famille a beaucoup de retentissement un peu partout dans le monde, affirme Jean-Marc Loubier, il y a donc un potentiel d'expression très grand. La conquête géographique consistera à densifier la présence internationale de la marque aux Etats-Unis par exemple, mais aussi en Asie ou dans les grands pays européens", précise-t-il.

Avant cela, Jean-Marc Loubier annonce qu'il faudra "s'assurer de la force de la proposition, de la première ligne qui est incontournable, de la contemporaine (Sonia by Sonia Rykiel) qui doit être au coeur de l'actualité, mais aussi du segment accessoires".

"Aujourd'hui, la force de la maison est bien sûr le prêt-à-porter, affirme Nathalie Rykiel, mais il faudra développer les autres segments comme la maroquinerie, le bijou ou la chaussure pour qu'ils ne soient plus seulement des compléments, mais qu'ils puissent vivre seuls". L'objectif affiché de Fung Brands est de doubler le chiffre d'affaires de Sonia Rykiel, aujourd'hui stagnant à un peu moins de 90 millions d'euros, d'ici à 5 ans.

Côté organigramme, aucun autre changement n'est annoncé pour l'instant. "Nous allons travailler main dans la main avec Jean-Marc Loubier, je continuerai à apporter ma vision stratégique et artistique", souligne Nathalie Rykiel. Quant à savoir si elle conserve la direction artistique qui la faisait superviser le travail d'April Crichton, directrice de la création: "Nous ne sommes pas encore entrés dans les détails des titres exacts, affirme-t-elle, mais comme je le disais je continuerai d'apporter ma contribution artistique à la maison".

Le montant de la transaction n'a pas été communiqué, mais Nathalie Rykiel a expliqué pourquoi avoir finalement choisi un candidat à un actionnariat majoritaire, plutôt que minoritaire, comme évoqué dans un premier temps. "Il ne fallait pas faire les choses à moitié. En étudiant les dossiers, j'ai réalisé que les actionnaires minoritaires avaient eux une vision à court terme", a-t-elle expliqué.

Enfin, à ceux qui regrettent le passage de cette maison très parisienne dans le giron du fonds hong-kongais, Nathalie Rykiel a souhaité adresser un message rassurant. "Si nous les avons choisis, c'est aussi parce que la rencontre avec Jean-Marc Loubier et Victor Fung (l'un des deux frères propriétaires, ndlr) m'a confortée dans l'idée qu'ils ont plus que conscience que la force de la maison, c'est qu'elle soit française, et même plus encore germanopratine. Mais on ne peut plus se permettre d'avoir une vision franco-française de nos jours si l'on veut avoir sa place sur le marché du luxe. Et l'on entend personne citer l'exemple de Lanvin, qui est pourtant l'une des plus belles maisons françaises, et qui connait sa réussite grâce à un formidable Alber Elbaz, mais surtout, une grande femme d'affaires taïwanaise..."