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28 avr. 2021
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Les 13 mesures de l'avenant au contrat stratégique de filière Mode et Luxe

Publié le
28 avr. 2021

Force est de constater que les hasards du calendrier sont parfois douloureux. Ce 26 avril était jour de signature. Entre les déplacements, engagements et quarantaines des officiels et ministres, deux avenants aux contrats stratégiques de filières ont finalement pu être paraphés lundi.


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Avec force communication, Bruno Le Maire (ministre de l'Economie), Elisabeth Borne (ministre du Travail), Jean-Baptiste Djebbari (ministre délégué auprès de la ministre de la Transition écologique, chargé des Transports) et Agnès Pannier-Runacher (ministre déléguée, chargée de l'Industrie) ont présenté les mesures contenues dans l'avenant au contrat stratégique de la filière automobile.

L'occasion de mettre en exergue le soutien à cette industrie via le Programme d'investissements d'avenir (PIA), la création de quatre nouveaux campus des métiers et qualifications dédiés à l'automobile, ou les millions d'euros octroyés dans le plan France Relance et qui permettent notamment d'accompagner les transitions de la filière de la fonderie automobile.

Dans le même temps, un simple communiqué de presse annonçait en fin de journée que Guillaume se Seynes, le président du Comité stratégique de filière Mode et luxe, avait signé l'avenant au contrat stratégique de ladite filière avec Roselyne Bachelot-Narquin (ministre de la Culture), et Agnès Pannier-Runacher.

Un document qui présente treize mesures qui viennent renforcer le contrat de filière signé en janvier 2019 à l'aune des défis soulevés par la crise liée à la pandémie de Covid-19.


Les branches Bijouterie, Chaussure, Couture, Cuirs et peaux, Horlogerie, Maroquinerie et textile sont ainsi concernées par ce texte qui aborde trois axes: la formation, l'accompagnement des entreprises et l'aide à la relocalisation, et enfin la traçabilité liée au défi de développer une mode durable. Le secteur, pour financer ces nouvelles mesures, s'appuie sur l’engagement des CPDE (Comités professionnels de développement économique), à savoir le Defi, le CTC et Francéclat, et de l’UIT (Union des industries textiles). Elles se basent, dans leur approche, sur les observations livrées dans le rapport "Relocalisation et mode durable", remis en début d'année au gouvernement.

Alors quelles sont ces mesures? Elles concernent tout d'abord la formation et le recrutement. Ainsi les actions de promotion, comme la campagne "Savoir pour Faire", vont être renouvelées. Une nouvelle offre d'accompagnement "sur mesure" des professionnels doit permettre l'insertion dans les entreprises et le développement ciblé des compétences. Enfin, le secteur se donne pour objectif de créer de nouveaux parcours d'apprentissage tout au long de la vie. L'objectif est de permettre aux salariés du secteur de continuer de renforcer leurs compétences au cours de leur carrière.

Des dispositifs d'accompagnement



L'accompagnement et l'aide à la relocalisation faisaient partie des points cruciaux du rapport comprenant 36 propositions remis à la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, en janvier. Six mesures concernent ce sujet. L'accélérateur Mode et Luxe, soutenu par Bpifrance, les CPDE, les fédérations mais aussi l'IFM (Institut français de la mode) et l'école ESCP, devrait être confirmé pour une troisième session. De plus, le ministère de la Culture débloque 500.000 euros pour accompagner en 2021 et 2022, via deux dispositifs, des jeunes marques et créateurs de mode et des entreprises des métiers d'art.

Pour les entrepreneurs souhaitant relocaliser, un module d'accompagnement avec Bpifrance va être déployé au second semestre 2021 pour "cartographier les chaînes de valeur et définir la stratégie de relocalisation". Afin de permettre aux entreprises de valider leur projet, un nouvel outil de calcul des coûts de fabrication est développé par le Centre européen des textiles innovants.

Ce démonstrateur devrait permettre de travailler sur différentes matrices. Cela pourra concerner "le coût d’un produit ou d’une collection dans les trois zones de sourcing France, Méditerranée et Asie, afin de comparer les taux de marge réels; le coût de revient industriel entre coût de main-d’œuvre et coût matière, selon différentes hypothèses de productivité du travail ; le coût minute de fabrication, selon différents paramètres d’équipement et de productivité des façonniers", est-il détaillé.

Pour 2021, est également annoncée une évolution pour permettre un meilleur accès à la commande publique des acteurs de la production française. Il est question de diffuser un outil de vulgarisation des principes de commande publique pour les TPE-PME, de la mise sur pied d'"une étude pour organiser le sourcing français" suivi de "la mise en place d'un outil filière de coordination des fabricants" et de la création d'un recueil de préconisations et de bonnes pratiques pour les acheteurs. Pour l'heure, il s'agit donc d'inviter les parties à mieux se comprendre.

Traçabilité et réduction de l'impact environnemental



Enfin, la traçabilité et l'impact environnemental du secteur, sujets déjà bien présents dans le contrat de filière en 2019, sont devenus plus prégnants ces derniers mois. Avec les moyens dont elle dispose, la filière va donc avancer sur plusieurs points dans les deux prochaines années.

L'avenant met notamment en avant la volonté de développer la chaîne de valeur pour favoriser les matières premières produites en France. Cela concerne le lin, dont les projets de filature montent en puissance, mais aussi la laine. "La France aurait l’opportunité de trouver une place privilégiée au sein d’une chaîne de valeur européenne de la laine. Un changement de modèle, qui implique une évolution des modalités d’élevage, est déjà en œuvre et a demandé des investissements importants. Il demande désormais, pour se déployer pleinement, la validation de modèles économiques et de suivis produits avec l'amélioration de la qualité chez les éleveurs et dans les entreprises, l'augmentation des capacités de traitement et filature, et la valorisation de la laine et des toisons hors habillement", est-il expliqué dans le document. Une cartographie de la filière est donc en réalisation.

Par ailleurs, le recyclage, axe important du contrat de filière, est de nouveau mis en avant avec l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) et l'éco-organisme Refashion afin de réaliser une étude sur la recherche de débouchés. L'idée est en effet de trouver et développer des projets viables économiquement en utilisant les matières premières de recyclage dans d'autres secteurs comme le bâtiment et le transport. 

Sur l'aval, le document présente trois mesures. La première concerne quasiment tous les acteurs du textile via la construction d'une base de données pour le calcul de l'impact environnemental. L'enjeu se situant au niveau européen, celle-ci sera autant un outil de travail pour les marques et entreprises qu'un outil de lobbying pour la filière française.

Ensuite, la traçabilité devient un enjeu fort pour le secteur, dont les pratiques vont être encadrées. Les travaux européens en la matière vont donc être suivis de près par l'UIT, le Defi, le CTC et les différents organismes concernés. Enfin, dans la continuité des travaux engagés depuis 2019 sur la traçabilité dans les différentes branches de la filière, des pilotes vont être déployés auprès d'entreprises dès cette année afin de tester la pertinence et l'efficacité de solutions de traçabilité dans l’habillement, la chaussure, le lin et le textile.

Si certaines de ces treize mesures annoncent des projets enthousiasmants pour le secteur, l'ensemble ne répond cependant pas aux ambitions affichées avec les 36 propositions du rapport présenté par le Comité stratégique de filière en début d'année. Un constat amer.

En 2019, lors de la signature du contrat de filière, il avait été rappelé que le secteur de la mode et du luxe était le premier secteur exportateur du pays, qu'il représentait 600.000 emplois et que son chiffre d'affaires de 154 milliards d'euros en faisait un contributeur plus important au PIB national que l'aéronautique et l'automobile. Un poids qui semble pourtant avoir des difficultés à peser à l'heure des décisions budgétaires.

Nombre d'acteurs du secteur avaient ainsi regretté que la filière, forte de son exemplarité et de sa mobilisation durant le premier confinement et l'appel à production de masques en France, n'ait pas bénéficié d'un engagement spécifique dans le plan France Relance. Cette absence de vision stratégique de l'Etat peut effectivement apparaître aujourd'hui comme un handicap pour accélérer la transformation du secteur et renforcer sa compétitivité.

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