Avec le départ de son PDG, Stanislas de Quercize, qui rejoindra Cartier en fin d'année en qualité de directeur général, la maison Van Cleef & Arpels s'apprête à tourner une page. Comment se prépare-t-elle aux nouveaux défis qui l'attendent ? Jean Bienaymé, directeur international du marketing et de la communication, précise d’emblée: "Il n'y aura pas de changements radicaux dans la politique de la maison car ce sera Nicolas Bos, l'actuel directeur de la création et patron de Van Cleef Amérique du Nord, qui prendra la place de Stanislas de Quercize. Cela signifie que notre chemin continuera dans la même direction qu'avant".

Jean Bienaymé, directeur international du marketing et de la communication de Van Cleef & Arpels

FashionMag: 2012 s'annonce une année importante pour Van Cleef. Pouvez-vous nous rappeler les grands rendez-vous qui rendent cette année si spéciale ?
Jean Bienaymé: Il y aura tout d'abord une grande exposition au MoCa (Musée d'art contemporain) de Shanghaï, qui s'ouvre le 19 mai. Nous présenterons 380 pièces groupées par thématiques. Nous sommes appréciés en Chine par un public de vrais connaisseurs, mais notre notoriété s’accroît rapidement, nous sommes présents non seulement à Pékin et Shanghaï, mais dans d'autres villes chinoises d'envergure moins connues en Occident. Ensuite, le 19 septembre, pendant 5 mois, nous serons les protagonistes d'une grande exposition dans la nef centrale du musée des arts décoratifs de Paris, qui cette fois proposera aux visiteurs un parcours organisé chronologiquement. Un plongeon dans l'histoire de la maison à travers 400 pièces. Dans les deux cas, la scénographie a été imaginée par le designer Patrick Juin, dont l'univers féminin et en rondeur correspond bien à notre maison. La précédente expo de cette taille à Paris avait été organisée au musée Galliera il y a 20 ans, en 1992.

FM: Quelle influence ont ces rendez-vous culturels sur votre activité commerciale ?
JB: Il y a d'abord une retombée sur l'image. Nous sommes une référence et ces opérations nous permettent de le réaffirmer. Ensuite je ne nie pas que nous ressentons des effets très positifs sur les ventes également, mais ce ne sont pas des opérations à des fins commerciales, il s'agit de faire connaître un patrimoine et un savoir-faire unique. Tout chez nous raconte une histoire, que ce soit les collections ou les pierres. Notre atelier à côté de la place Vendôme n'est pas un conservatoire des métiers, mais notre cœur vivant, un vrai laboratoire de recherche. On continue à y inventer des techniques innovantes. 40 artisans joailliers que l'on appelle les mains d'or continuent d'ici à faire vivre la grande joaillerie.

FM: Cette dimension culturelle nourrit également votre nouvelle école qui vient d'ouvrir ses portes. Quel a été l'accueil de cette institution auprès du public ?
JB: Très encourageant. Nous avons organisé une première session de cours qui a été fréquentée par 135 élèves de 30 nationalités différentes ! L'information a circulé très vite. Il y a même eu une Coréenne qui est venue en voyage de noces à Paris et a demandé une de nos formations comme cadeau de noces à son mari. Bref, un très joli succès. Après cette année à Paris, nous l'exporterons dans d'autres pays. Le principe est d'en faire une école nomade, d'aller à la rencontre des passionnés de joaillerie et de gemmologie du monde entier. On ira en Chine, aux Etats-Unis, en Italie, au Japon. Les gens sont en quête de sens et en quête de beau.

FM: Vous n'avez jamais été tenté d'investir d'autres territoires que la joaillerie (mis à part les parfums, en licence avec Interparfums) ?
JB: Si votre raison d'être est la haute joaillerie et d'en être le référent, vous n'avez pas de tentations. Il ne peut pas y avoir de compromis et faire des choses qui ne nous correspondent pas. Nous ne sommes pas tentés d'aller sur des secteurs qui ne sont pas les nôtres.

FM: Comment jugez-vous les tentatives de certaines marques, comme Mauboussin, de changer la typologie du consommateur de bijoux et de s'ouvrir à un marché plus grand public ?
JB: La joaillerie est un marché vif, qui évolue, la clientèle est plus mélangée, du fait aussi des nouvelles classes sociales émergentes dans de nouveaux pays. Cela dit, nous sommes joailliers depuis 1906 et nous sommes fidèles à ce que nos clients apprécient. Nous voulons construire une relation à long terme avec eux, c'est la raison pour laquelle chez nous les histoires sont si importantes, elles créent un lien, elles se transmettent".

FM: Quels sont les marchés les plus importants pour Van Cleef ?
JB: Notre chiffre d'affaires se partage d'une façon très équilibrée entre l'Europe, l'Asie et les Etats-Unis.

FM: Des projets d'ouverture de boutiques ?
JB: Nos prochains projets visent la Chine et le Moyen-Orient. Mais plus encore que multiplier les points de vente, nous avons à cœur l'accueil de nos clients, d'où notre politique d'amélioration constante des boutiques existantes. Nous avons récemment rouvert notre flagship à Hong Kong, à Prince Building, et réaménagé la boutique de Tokyo. La boutique de New York sera revue d'ici un an. En France nous allons ouvrir ce mois-ci aux Galeries Lafayette et nous nous apprêtons, dans quelques mois, à apporter des innovations également dans notre flagship parisien.

Silvia Manzoni